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La sexualité des femmes vue comme une menace

Les mutilations génitales féminines ne se limitent pas à une question sanitaire. Elles engagent également des débats autour de la sexualité.
Illustration originale réalisée par Naomi Vona ; photo : Hana Lopez (Unsplash).

Les motifs religieux, culturels et traditionnels comptent parmi les raisons les plus fréquemment invoquées pour expliquer les mutilations génitales féminines. Pourtant, presque chacun sait que cette pratique engendre une atténuation du désir sexuel, et cette diminution constitue en réalité l’une des principales raisons à l’origine de ces mutilations. De nombreux partisans des mutilations génitales féminines affirment qu’une sexualité non contrôlée représente en quelque sorte une menace pour la chasteté, l’honneur et la vertu (Berg et Denison, 2013).

D’après des spécialistes, les discussions ouvertes sur la sexualité des femmes, l’intégrité physique et l’autonomie corporelle peuvent être un moyen inattendu de lutter contre cette pratique.

Par le passé, les interventions visant à mettre fin aux mutilations génitales féminines ont surtout porté sur la sensibilisation aux blessures physiques engendrées par cette pratique, en particulier le risque d’hémorragie, de septicémie, de complications à l’accouchement, voire de décès. Les communautés conservatrices, au sein desquelles la sexualité des femmes est un sujet tabou, sont généralement plus sensibles aux préjudices physiques. Toutefois, en mettant exclusivement l’accent sur ceux‑ci, on risque involontairement d’encourager la médicalisation de cette pratique ou la pratique d’autres types d’ablation, plutôt que son abandon total (Powell et Yussuf, 2021).

Aborder ouvertement les préjudices sexuels causés par la mutilation génitale féminine a permis à Wafaa Benjamin Basta, gynécologue-obstétricienne en Égypte, de convaincre certains parents de refuser cette pratique. Le fait d’expliquer clairement les préjudices, tels que l’incapacité à avoir un orgasme, la douleur pendant les rapports sexuels, et l’aversion pour le sexe engendrée par l’état de stress post-traumatique, a été un facteur de dissuasion efficace, en particulier « si la mère a été traumatisée par une mutilation génitale qu’elle a elle‑même subie durant l’enfance ou a rencontré des difficultés dans sa vie de couple à cause de l’excision », selon le Dr Basta.

Elle évoque avec simplicité les répercussions sociales et psychologiques auxquelles les femmes peuvent être confrontées. « [Ces mutilations peuvent] avoir une incidence sur leur santé mentale, leur bien‑être social et leur relation avec leur partenaire, ce qui peut avoir des conséquences notables sur la notion de famille elle‑même. »

C’est, entre autres, en sa qualité de médecin que le Dr Basta est à même d’engager ces discussions franches et ouvertes. « Un lien se crée entre les patientes et le médecin », explique‑t‑elle. Cependant, la reconnaissance croissante des droits des femmes et de leur autonomisation en Égypte joue un rôle encore plus fondamental. « Les mentalités évoluent, en particulier parmi les nouvelles générations. »

Plus les craintes liées à la sexualité féminine se dissipent et le bien‑être sexuel est pris en compte dans le cadre de la santé psychologique et sociale, plus il est aisé de repenser la pratique des mutilations génitales féminines.

Le Dr Basta signale que ses observations se limitent aux conversations confidentielles qu’elle peut avoir avec ses patientes, et que la facilité à aborder ces sujets varie d’une communauté à une autre et d’un médecin à un autre. Elle a cependant constaté d’importants progrès ces dernières années, et se montre optimiste quant à l’avenir en ce qui concerne l’élimination des mutilations génitales féminines, mais également la promotion de la santé et du bien‑être sexuels des femmes. « Il n’y a pas de honte à parler de ces sujets », conclut‑elle.

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Le piège de la masculinité

Alexander Armando Morales Tecún sensibilise les jeunes à l’égalité des genres.
Illustration originale réalisée par Naomi Vona ; photo : © UNFPA/J. Serrano

La beauté luxuriante des hauts plateaux du centre du Guatemala dissimule une réalité bien sombre pour les femmes et les filles, comme l’explique Alexander Armando Morales Tecún, éducateur autochtone chargé de la jeunesse et défenseur de l’égalité des genres du département rural de Quiché. « Dans de nombreux endroits, les femmes sont tenues pour responsables si elles sont agressées. On les accuse d’avoir tenté ou séduit leur agresseur ou leur violeur, à cause de leur tenue vestimentaire ou de leur attitude, par exemple. »

Cette mentalité n’est pas propre au Guatemala, même si ce pays se classe dans le dernier tiers des nations et territoires en ce qui concerne les mesures relatives à la sécurité et au bien‑être des femmes, selon l’Indice sur les femmes et la paix et la sécurité établi en 2019 par l’Université de Georgetown. En effet, dans le monde entier, les victimes sont régulièrement accusées d’avoir provoqué la violence basée sur le genre : elles se trouvaient au mauvais endroit, portaient une tenue inappropriée, ne se comportaient pas correctement, ou affichaient tout simplement un développement physique précoce. Ces facteurs sont d’ailleurs souvent considérés comme des circonstances atténuantes ou disculpatoires pour les auteurs de violence.

Ainsi, en 1998, la Cour suprême italienne a annulé la condamnation pour viol d’un homme dont l’accusatrice portait un jean moulant au moment de l’agression. En 2010, lors du viol collectif d’une fille de 11 ans par plus d’une douzaine d’hommes et de garçons aux États‑Unis, des médias nationaux ont signalé que celle‑ci était connue pour s’habiller de façon inconvenante pour son âge. En Afghanistan, les survivantes de viol risquent la prison pour « crime de moralité ».

La critique et l’humiliation des victimes plutôt que des auteurs trouvent leur origine dans les normes qui encouragent les hommes à prendre le contrôle du corps des femmes, mais également de leur famille. M. Tecún se rappelle avoir demandé à un groupe de jeunes hommes pourquoi ils voulaient se marier. « Je veux diriger ma famille, avoir quelqu’un qui me prépare à manger, qui lave mes vêtements, qui me donne des enfants et qui fait le ménage », a répondu l’un d’eux.

D’après Jay Silverman, professeur à l’école de médecine de San Diego (Université de Californie) qui étudie la coercition reproductive, ces attitudes sont universelles. « Souvent, le droit que s’arrogent les hommes de contrôler leurs partenaires féminines s’étend également aux enfants. La perception de ce droit est maintenue par toutes sortes de structures et de normes dans les communautés et les nations du monde entier. »

Néanmoins, les conséquences ne se limitent pas à une simple opposition entre hommes et femmes, prévient M. Tecún. Ces normes de genre — un « modèle hégémonique de masculinité », selon lui — peuvent également donner aux hommes le sentiment d’être pris au piège : « Si on n’est pas marié, on n’est pas un homme. Si on n’est pas en couple, on n’est pas un homme. »

Quant aux femmes, il ajoute qu’elles contribuent également à perpétuer ces croyances. « De nombreuses femmes réaffirment également qu’il est acceptable de battre son épouse lorsqu’elle n’a pas accompli son devoir : si elle n’a pas lavé les vêtements de son mari, si elle a laissé brûler son repas... Elles trouvent ça juste qu’une femme soit battue parce qu’elle n’a pas satisfait son mari comme elle l’aurait dû. »

Ces idées sont inculquées très tôt et renforcées par « la musique, les jeux, les images et la publicité », explique M. Tecún. « Dans le village d’où je viens, pour célébrer la naissance d’un garçon, on prépare un bon bouillon de volaille créole. Mais après la naissance d’une fille, le village est totalement silencieux, comme pour une veillée funèbre. »

Tout ce qui porte atteinte à ces normes, notamment le concept même d’autonomie corporelle, peut être considéré comme une menace, selon Romeo Alejandro Méndez Zúñiga, un autre éducateur et militant autochtone de Quiché. « Les rares personnes à avoir déjà entendu parler d’autonomie corporelle s’en font une idée négative, parce que cela porte atteinte au système patriarcal machiste », affirme‑t‑il.

Zúñiga souhaite que les hommes et les garçons adhèrent à de nouvelles normes qui libéreront hommes et femmes des idéaux masculins traditionnels. « Notre société mérite de nouveaux modèles de masculinité, de nouvelles manières d’envisager la virilité, qui renforcent et favorisent l’égalité des chances en matière de développement, et qui nous permettent à tous de vivre avec dignité. »

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Soigner les corps, les mentalités et les esprits

Des membres du personnel médical du centre de santé de la région d’Ayacucho, au Pérou, parmi lesquels le sage-femme Victor Cazorla (cinquième en partant de la gauche).
Illustration originale réalisée par Naomi Vona ; photo : © UNFPA/A. Castañeda

Les prestataires de soins de santé ont la responsabilité particulière de promouvoir et de préserver l’autonomie corporelle de leurs patientes. « Mon conseil pour tout agent de santé serait de faire preuve d’empathie », déclare Víctor Cazorla, un homme qui exerce la profession de sage-femme dans les Andes péruviennes. Ayant travaillé pendant plus de vingt ans auprès des communautés indigènes de la région d’Ayacucho, il ne connaît que trop bien les difficultés qui menacent le bien‑être et l’autonomie des patientes les plus vulnérables.

« La logique de travail des agents de santé tourne souvent autour du concept de production, or la production est synonyme de quantité », explique‑t‑il. « Nous négligeons la qualité des soins que nous prodiguons à nos patientes. Il existe également des barrières culturelles », ajoute‑t‑il. « Nombre de nos collègues et de nos collaborateurs se sont rendus en zone rurale sans connaître le quechua, la langue maternelle des communautés locales », engendrant des malentendus et même des actes de discrimination.

Parallèlement, de nombreuses patientes n’ont pas été sensibilisées à leurs droits en matière de sexualité et de reproduction. « Au sein de la population générale, je dirais qu’environ 80 à 90 % des femmes ne sont pas en mesure de décider elles‑mêmes quand elles souhaitent avoir des relations sexuelles avec leur partenaire... La misogynie prédomine », précise‑t‑il. « Les patientes se sentent souvent incapables de parler ouvertement de leur santé sexuelle, et elles peuvent hésiter à exprimer leur malaise vis-à-vis des procédures gynécologiques, en particulier avec les prestataires de santé masculins. »

La combinaison de ces facteurs est particulièrement néfaste : les médecins peinent à comprendre les besoins et les limites de leurs patientes, et celles‑ci se retrouvent privées des mots et des outils pour se défendre.

Ces préoccupations sont d’autant plus vives lorsque les agents de santé ont affaire à des survivantes de violences sexuelles et basées sur le genre. « En Syrie, plus de la moitié des femmes ignorent leurs droits sur le plan de la sexualité, de la santé physique et en général », affirme Mouna Farhoud, gynécologue spécialisée dans la prise en charge des survivantes de violences sexuelles. « Même les femmes diplômées sont exposées à la violence et ne sont pas en mesure de réagir. Elles considèrent que le fait de parler de ces sujets porte atteinte à leur dignité et à leur réputation. »

Selon le Dr Farhoud, les professionnels de santé eux‑mêmes peuvent avoir des opinions qui nuisent à la santé et aux droits de leurs patientes. Elle se rappelle une formation donnée à des professionnels de santé sur le traitement des survivantes d’agressions sexuelles : « Les participants ont formulé de nombreuses objections... Il y avait un déni manifeste et un manque de reconnaissance de l’existence des cas d’agression sexuelle. »

Les médecins doivent être en mesure de communiquer avec leurs patientes sans porter de jugement, et savoir reconnaître quand leurs patientes se sentent mal à l’aise ou ont subi des abus. Parfois, comme l’explique le Dr Farhoud, cela signifie jouer le rôle de détective : « Peut‑être que les symptômes de la patiente ne sont pas en adéquation avec ses propos. Sa façon de marcher, son regard, ses mots, son compagnon, l’examen physique : tous ces éléments réunis révèlent l’existence d’un problème. »

Les agents de santé doivent également savoir quand il convient de faire marche arrière. « Les patientes sont en droit de refuser. Lorsque j’examine une patiente, par exemple lors d’un examen gynécologique, j’explique son importance, en particulier pour les personnes qui ont subi des agressions sexuelles », explique le Dr Farhoud. « Je précise qu’il s’agit d’une procédure médicale visant à déterminer s’il y a des infections, des blessures, des saignements, des hématomes ou des éléments qui permettent de constituer des preuves. Acceptent‑elles de se soumettre à l’examen ? Même lorsqu’elles comprennent que l’objectif est de constituer un dossier, si elles ne sont pas préparées psychologiquement, nous devons respecter leur choix. Peut‑être que nous ne serons pas en mesure de les examiner cette fois‑ci, mais nous pourrons le faire une prochaine fois lorsqu’elles se sentiront respectées et valorisées. »

Víctor Cazorla ajoute que le respect de chaque culture est primordial. Mais ce qui importe le plus selon lui, c’est de donner aux patientes elles‑mêmes les moyens de se poser en défenseuses de leur corps et de leur autonomie : « Nous leur apprenons à exiger le respect, à ce que personne n’ait le droit de toucher leur corps : ni moi, ni leur tante, ni leur père, ni leur mère, ni le personnel, ni la police, ni personne. »

Avec ses collègues, il organise régulièrement des séances éducatives destinées à la communauté. Les questions liées aux droits, à l’estime de soi, à la santé sexuelle et au maintien de relations saines sont également abordées lors de séances de conseil individuelles et familiales. « Ces efforts font la différence, en particulier chez les jeunes », affirme‑t‑il. Mais la responsabilité de communiquer ces informations repose lourdement sur les prestataires de santé : « Je suis l’unique sage-femme à travailler en rotation au centre de santé et je dois rester sur place pour assister les patientes qui arrivent en urgence ». Il ajoute que davantage de ressources sont nécessaires en matière de santé, y compris s’agissant du personnel, afin de pouvoir proposer davantage de services d’éducation communautaire, tels que des programmes ciblés pour les hommes et les garçons.

Le Dr Farhoud rejoint son appel au soutien. Son organisation mène également des séances de sensibilisation pour la communauté, mais elle souhaite que les agents de santé soient mieux formés et responsabilisés. En tant que prestataires de services de santé sexuelle et reproductive, ils ont un devoir particulier : celui de respecter et d’encourager l’autonomisation de leurs patientes. « Nous avons prêté serment », conclut‑elle.

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Le vocabulaire du viol

Leidy Londono s’engage corps et âme pour aider les personnes survivantes d’agressions sexuelles, en leur apportant soutien et informations par téléphone ou sur les forums en ligne.
Illustration originale réalisée par Naomi Vona ; photo : © UNFPA/R. Zerzan.

Au cours de ses années passées à défendre les personnes survivantes de violences sexuelles aux États‑Unis, Leidy Londono s’est familiarisée avec le vocabulaire du choc, de la peur et de la honte que ces personnes emploient pour raconter les conséquences de l’agression sexuelle. Les personnes survivantes dont elle s’occupait n’arrivaient pas à mettre les mots sur une forme spécifique de violence sexuelle, omniprésente et pourtant méconnue, même par ceux qui la subissent ou qui la commettent : la coercition reproductive.

« Il s’agit de comportements relatifs à la santé reproductive adoptés par un partenaire ou une personne dans le but de conserver le pouvoir et le contrôle au sein d’une relation », explique Leidy Londono, qui accompagnait les personnes survivantes dans les hôpitaux et les conseillait par téléphone. Elle travaille désormais comme éducatrice et directrice de programme au planning familial de Washington, DC. « [Cette pratique] peut prendre diverses formes. Il peut s’agir de tentatives manifestes de mettre enceinte sa partenaire contre sa volonté. Par exemple, le conjoint peut tenter de contrôler l’issue d’une grossesse, ou un partenaire peut forcer l’autre à avoir des rapports sexuels non protégés, interférer explicitement ou implicitement avec les moyens de contraception utilisés, ou mentir au sujet de la méthode de contraception. »

Il n’existe pas de vocabulaire commun permettant aux personnes survivantes de décrire le sentiment de violation spécifique qu’elles ressentent après avoir été privées de leur droit de contrôler leur fertilité ou leur santé sexuelle, qu’elles aient consenti ou non au rapport sexuel. En l’absence de mots pour qualifier ce qu’elles ont vécu, les personnes survivantes expriment souvent un sentiment de confusion et de culpabilité. Leidy Londono se souvient d’une jeune personne qui avait découvert que son partenaire avait enlevé son préservatif sans lui dire pendant un rapport sexuel consenti, une pratique connue sous le nom de « stealthing ». « Au début, elle me demandait “Est-ce que j’exagère ?” ».

Le concept de coercition reproductive est relativement nouveau ; la majorité des études sur le sujet ont été menées au cours des 20 dernières années, dont la plupart aux États-Unis, où la prévalence de cette pratique est estimée entre 15 et 25 % (Park et al., 2016). Des enquêtes récentes montrent toutefois que la coercition reproductive est une pratique répandue dans le monde et qu’elle peut être commise non seulement par les partenaires, mais également par les familles et les membres de la communauté (Grace et Fleming, 2016). Elle est parfois même encouragée par le système de santé, au travers de politiques qui exigent l’autorisation du mari pour que sa femme puisse recourir à la planification familiale, par exemple.

Dipika Paul a travaillé plusieurs décennies en tant que chercheuse spécialisée dans la santé sexuelle et reproductive au Bangladesh. Pourtant, elle affirme qu’elle ne connaissait pas le terme de « coercition reproductive ». Elle, les agents de santé et les défenseurs décrivaient plutôt ce phénomène comme des « obstacles à la planification familiale ».

Aujourd’hui, Dipika Paul est une experte dans le domaine. Elle travaille désormais à Dhaka en tant que conseillère au sein d’Ipas et est confrontée à de nombreuses formes de coercition reproductive. « Les maris peuvent commencer par leur dire de ne pas utiliser de contraceptifs, et les femmes se conforment aux désirs de leur mari. Cela peut aller jusqu’à des violences graves. Parfois, les maris les privent de nourriture ou d’argent si elles veulent continuer à recourir à la contraception », indique‑t‑elle. Souvent, cette pression est liée au « désir du mari ou d’un autre membre de la famille d’avoir un autre enfant ou un fils ». Elle observe d’autres formes de pression, telles que le recours imposé à la contraception ou les avortements forcés.

Ces actes coercitifs ne sont généralement pas considérés comme des formes de violence, car la procréation tend à être perçue comme une décision familiale. « La belle-famille joue un rôle important », ajoute Dipika Paul. C’est particulièrement vrai lorsque les épouses sont jeunes et mineures. Selon une étude démographique et de santé réalisée en 2018, l’âge médian au premier mariage est de 16 ans. « Les jeunes femmes peuvent difficilement prendre des décisions seules. »

Et pourtant, le lien entre coercition reproductive et violence est évident. Dipika Paul, qui mène actuellement une étude, estime que près de trois femmes sur cinq qui déclarent avoir subi une coercition reproductive ont également subi des actes de violence sexuelle ou physique perpétrés par leur mari.

Jay Silverman, professeur à l’école de médecine de San Diego (Université de Californie) a commencé sa carrière en travaillant avec des hommes et des garçons ayant commis des actes de violence contre leur partenaire intime. Il s’est depuis penché sur la question de la coercition reproductive au Bangladesh, aux États-Unis, en Inde, au Kenya et au Niger et estime que, bien que les actes de coercition reproductive soient parfois perpétrés par des membres de la famille de sexe féminin, cet abus est ancré dans les inégalités de genre.

« Il y a une implication universelle », explique‑t‑il, « et il s’agit des prérogatives dont disposent les hommes pour contrôler leurs femmes… À un certain niveau, ce sentiment que les hommes ont, ce droit à un tel contrôle, est quelque chose qui, d’après moi, est omniprésent dans la plupart de nos sociétés. »

Jay Silverman et ses collègues, dont ceux de l’Ipas au Bangladesh, expérimentent actuellement des outils permettant aux agents de santé de détecter les cas de coercition reproductive, notamment par le biais de questions relatives aux attitudes et au comportement du partenaire. Lorsque la coercition est avérée, les femmes peuvent réaffirmer leur autonomie corporelle en optant par exemple pour des méthodes de planification familiale indétectables par le partenaire.

Même lorsqu’une femme ne dispose pas du vocabulaire pour décrire ce qu’elle vit, « je suis convaincu que les êtres humains refusent par nature d’être contrôlés… Les femmes dans les communautés du monde entier ont élaboré de nombreuses stratégies d’adaptation différentes pour combattre la coercition reproductive, notamment en s’entraidant. C’est quelque chose qui se produit naturellement, partout dans le monde. Cela a toujours été le cas, qu’il s’agisse d’une voisine ou d’une femme de la famille qui cache votre pilule contraceptive pour vous ou vous aide à vous rendre dans une clinique », explique Jay Silverman. Il ajoute que, lorsque des femmes se rendent dans des cliniques mettant à la disposition des patientes des prospectus sur la coercition reproductive, la violence exercée par le partenaire et les aides existantes, elles en prennent souvent plusieurs pour les distribuer aux autres femmes.

La responsabilité de la prise en charge de la coercition reproductive incombe en grande partie aux prestataires de services, qui sont souvent confrontés à une double contrainte : ils doivent en effet trouver un équilibre entre l’implication des hommes dans les questions relatives à la santé reproductive sans leur donner un pouvoir de décision total. « Cet idéal d’implication des hommes dans la santé sexuelle et reproductive et dans la santé maternelle et infantile est devenu une priorité à l’échelle internationale », poursuit Jay Silverman. L’implication masculine a été associée à un recours accru à la planification familiale et à la contraception et une amélioration de la santé maternelle et infantile (Kriel et al., 2019 ; Assaf et Davis, 2018). Néanmoins, lorsque les hommes veulent contrôler les choix de leur partenaire en matière de reproduction, « l’implication des hommes porte évidemment préjudice aux femmes ».

Les hommes, et les individus quels que soient leur genre et leur orientation sexuelle, peuvent également subir des actes de coercition reproductive. « Tout le monde peut être victime de coercition reproductive », précise Leidy Londono. « Les femmes appartenant aux communautés marginalisées subissent des niveaux de violence particulièrement élevés, y compris des actes de coercition reproductive… Mais cela ne nie pas pour autant le fait que j’ai échangé avec des jeunes garçons et des jeunes hommes, des hommes en général, qui tentaient de mettre des mots sur ce qu’ils ont vécu, de définir et de contextualiser leur expérience. »

Il est nécessaire d’expliciter le lexique de la coercition reproductive, en particulier chez les décideurs. « Lorsque nos lois et nos politiques sont imprécises et que notre vocabulaire est ambigu, les personnes survivantes ne sont pas reconnues », poursuit Leidy Londono.

La connaissance de l’autonomie corporelle est également primordiale. Dans le cadre d’un projet récent, « nous avons échangé avec des femmes, et elles ont choisi ces termes : “mon corps, mes droits”… [Ces femmes] ont toutes convenu que nous devions diffuser l’idée que chacune et chacun a le droit de disposer de son propre corps au sein de la population », explique Dipika Paul.

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L’importance d’une communauté soudée

Ayim évoque son sentiment d’isolement avant son intégration au sein de la communauté LGBTI.
Illustration originale réalisée par Naomi Vona ; avec l’aimable autorisation d’Ayim.

Daniyar s’est rendu compte qu’il était transgenre à l’âge de 7 ans, mais il s’est cru seul pendant des années. « Vers 15-16 ans, j’ai fait une grave dépression. Je ne m’acceptais pas... Je ne savais pas qu’il existait des communautés et des organisations LGBTI au Kirghizistan. » Ce n’est que lorsque quelqu’un l’a informé de l’existence d’un groupe LGBTI local qu’il s’est senti armé pour reprendre le contrôle de son corps et de sa vie. « Je me suis senti dans mon élément, explique‑t‑il. Avant ça, j’avais l’impression de vivre dans un corps qui n’était pas le mien. Mais j’ai entendu parler des personnes transgenres, j’ai commencé à me renseigner à ce sujet, et c’est là que j’ai entamé ma transition. »

À maintenant 23 ans, Daniyar sait que ce qu’il a vécu est loin d’être une expérience unique. En effet, défenseurs et chercheurs étudient depuis longtemps par quels moyens créatifs et collectifs certaines personnes se réunissent pour revendiquer leur autonomie corporelle lorsque celle‑ci est menacée. Les personnes LGBTI sont ainsi parvenues à créer des espaces d’entraide sûrs, y compris dans les environnements les plus liberticides de la planète. Et ce n’est qu’un exemple parmi d’autres. Les professionnel(le)s du sexe se rencontrent pour partager des informations concernant des clients violents. Les femmes s’entraident pour dissimuler des contraceptifs, fuir un partenaire violent ou interrompre une grossesse non désirée dans les pays où l’avortement est difficilement accessible ou illégal. Lorsque c’est possible, ces réseaux informels tendent à prendre la forme plus officielle de groupes de plaidoyer, véritables moteurs de changement.

C’est ce qui se passe au Kirghizistan, témoigne Ayim, jeune femme transgenre de 24 ans. Elle aussi s’est sentie isolée pendant des années avant de découvrir l’acceptation et la solidarité au sein de la communauté LGBTI. « Je portais les jupes de ma mère. Elle se moquait de moi et me méprisait en même temps... Quand j’ai démarré mes études à l’université, j’ai pris conscience que je devais révéler qui j’étais ; que si je dissimulais mon identité toute ma vie, je serais prise au piège. En 2016, j’ai commencé à réellement lier connaissance avec les personnes de la communauté LGBTI. »

Aujourd’hui, Daniyar et Ayim sont tous deux militants LGBTI. Ils travaillent avec une organisation non gouvernementale locale, Kyrgyz Indigo, pour proposer aux personnes LGBTI qui en ont besoin des services d’aide au logement et d’accès aux soins et aux informations en matière de santé, entre autres. Ce soutien est indispensable dans un pays où les personnes LGBTI sont souvent victimes de discriminations. Selon eux, les personnes transgenres sont particulièrement vulnérables et connaissent un taux de chômage élevé, en partie parce qu’elles ne peuvent pas modifier leurs papiers d’identité afin qu’ils correspondent à leur identité de genre. « Les derniers amendements apportés à la législation interdisent aux citoyens de modifier leur passeport pour changer la mention de leur genre », explique Daniyar. Il existe par ailleurs très peu de médecins spécialistes qui accompagnent la transition des personnes transgenres, ce qui rend ce processus extrêmement coûteux. « Beaucoup sacrifient leur alimentation ou leur sommeil [en travaillant jour et nuit] afin de pouvoir économiser pour l’intervention chirurgicale qui leur permettra de remodeler leur corps. »

En dépit des risques, ils sont motivés par une connaissance intime des batailles livrées au sein de leur communauté. « On a des problèmes communs et on sait comment s’entraider, explique Ayim. On reste soudés. » De toute façon, exprimer sa véritable identité de genre n’est pas négociable, selon eux. C’est une question de vie ou de mort. Si les personnes transgenres étaient obligées de se cacher complètement, « je pense qu’il y aurait de nombreux suicides », analyse Daniyar. Ou alors, elles « fuiraient le Kirghizistan et deviendraient des réfugiés, parce que vivre dans un corps qui n’est pas le sien, c’est terrible », renchérit Ayim.

La menace de violences plane constamment au‑dessus de leur tête. Tous deux ont déjà été menacés, et certains de leurs amis ont subi des agressions. « Il y a beaucoup d’histoires similaires, confie Daniyar. Ces personnes sont passées à tabac ou emmenées quelque part, dans les montagnes, à l’extérieur de la ville... Elles sont battues à mort ou quasiment, puis abandonnées dans un terrain vague. »

Les conditions de vie de la communauté ont empiré dans le contexte de la pandémie de COVID-19, car de nombreuses personnes ayant perdu leur emploi se sont retrouvées sans abri, confrontées à la faim ou incapables de se payer leurs médicaments. Kyrgyz Indigo a fourni de la nourriture et des produits essentiels (notamment savon, papier toilette et protections périodiques) à ceux qui en avaient besoin, afin de permettre aux personnes transgenres de poursuivre leur traitement hormonal et aux personnes vivant avec le VIH de continuer les antirétroviraux. L’organisation gère également trois refuges depuis le début de la pandémie afin de répondre aux besoins croissants d’hébergement d’urgence.

Ayim et Daniyar sont convaincus que leur expérience est source d’enseignements pour d’autres communautés marginalisées qui s’efforcent de défendre leurs droits et leur autonomie corporelle. En premier lieu, « il faut donner des moyens d’action à la communauté et accroître sa visibilité », conseille Ayim. C’est à Bichkek, la capitale, que les questions LGBTI trouvent une oreille plus attentive, grâce à la présence de groupes militants et d’initiatives déployées là-bas, explique‑t‑elle.

Toutefois, les militants doivent également être préparés à rencontrer une certaine opposition, et ils doivent se protéger. « Il faut être prêt à faire face à tout type de réactions et agir sans crainte, confie Ayim. Quand on se consacre entièrement au militantisme, à un travail pareil, c’est le burn-out assuré. » Pour elle, le plus important, c’est la confiance en soi : « L’essentiel, c’est de se faire confiance, de faire confiance à son propre pouvoir... N’ayez peur de personne. Parce que vous êtes là, nous sommes là, et ensemble, on peut tous aller plus loin. »

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Accouchement : le travail d’une mère porteuse

Selon les expert(e)s, les responsables politiques ne prennent que très rarement en compte le point de vue des mères porteuses dans l’élaboration des lois en la matière.
illustration originale réalisée par naomi vona ; photo par alexander krivitskiyz pour unsplash.

Josefina se souvient du moment où elle a pris la décision de devenir mère porteuse. « Je l’ai fait en partie pour l’argent, mais ce qui m’a vraiment touchée, c’est le fait de pouvoir permettre à de nombreuses femmes de réaliser leur rêve d’avoir un bébé », déclare‑t‑elle. Pourtant, elle n’avait pas imaginé que l’agence spécialisée dans la gestation pour autrui dans laquelle elle s’était rendue serait si mal gérée et s’adonnerait à des pratiques abusives.

« Je pensais que je me retrouverais avec d’autres femmes comme moi : certaines de leur décision et ayant déjà eu au moins un enfant, comme l’exigent les protocoles. Mais ce n’était pas comme ça dans la clinique où je me suis rendue. Il y avait beaucoup de jeunes femmes qui n’avaient encore jamais eu d’enfants. Je me rappelle m’être demandé “Où suis-je tombée ?” ». Après quelques mois de grossesse, elle, ainsi que deux ou trois mères porteuses et certains de leurs enfants, ont été emmenés dans une maison vétuste sans eau, ni électricité ni nourriture, puis enfermés à l’intérieur.

Même s’il ne s’agissait que d’un lieu d’hébergement temporaire, Josefina (nom d’emprunt), qui vit au Mexique, raconte qu’elle s’est soudainement inquiétée que sa grossesse puisse avoir un autre but que celui de porter un bébé pour autrui. « J’ai pensé à beaucoup de choses, comme le trafic d’enfants ou le trafic d’organes. » Grâce à son téléphone portable, qu’elle avait gardé sur elle, elle est parvenue à contacter discrètement les futurs parents de l’enfant, ce qu’on lui avait formellement interdit de faire. « J’ai retrouvé les parents sur Facebook », poursuit‑elle. « Ils se sont montrés très sympathiques avec moi et m’ont soutenue. » Eux et Josefina se sont alors tournés vers une autre agence. « J’ai poursuivi le processus dans un endroit plus sûr, où je me sentais plus en confiance. »

Pourtant, malgré cette mauvaise expérience, Josefina affirme qu’elle n’a jamais douté une seule seconde de sa décision. « J’étais sûre de vouloir cet enfant. Je n’ai aucun regret. C’était une aventure », ajoute‑t‑elle. « Après avoir rencontré les parents, j’étais très satisfaite du processus. »

Elle envisage même de recommencer.

La gestation pour autrui fait depuis longtemps l’objet de nombreux débats d’ordre éthique et juridique. Plusieurs affaires et batailles judiciaires pour la garde de l’enfant très médiatisées aux États-Unis, en Inde et dans d’autres pays du monde, ont suscité des interrogations sur les droits et les responsabilités des mères porteuses et des parents d’intention, ainsi que sur les droits des bébés issus de cette méthode de procréation (Nadimpally et al., 2016). La législation dans ce domaine varie fortement d’un pays à l’autre et au sein même des pays. La gestation pour autrui est totalement interdite dans certains pays. D’autres États l’interdisent lorsqu’elle est rémunérée ou « commerciale », mais l’autorisent si elle est non rémunérée, quand d’autres autorisent les deux ou ne disposent pas de lois propres à cette méthode de procréation (University of Chicago Laboratory Schools, 2019).

Dans les pays où la loi autorise la gestation pour autrui rémunérée, on assiste souvent à l’émergence d’une industrie lucrative, profitable aux cliniques de procréation médicalement assistée, aux tour-opérateurs spécialisés dans le tourisme médical, aux cabinets d’avocats et aux recruteurs ou autres. Les pays dans lesquels le prix de la gestation pour autrui est moins élevé peuvent devenir des destinations très prisées par les parents recourant à cette pratique. Pourtant, dans ces pays, la gestation pour autrui est souvent l’un des seuls moyens viables dont disposent les femmes marginalisées sur le plan économique pour gagner de l’argent, ce qui présente un risque d’exploitation à l’endroit des femmes. Les intermédiaires et les agences peuvent contrôler l’échange d’argent et des informations ainsi que la prestation des soins de santé. Les mères porteuses risquent ainsi d’être sous-payées et mal informées, et de ne pas bénéficier des soins nécessaires (Nadimpally et al., 2016).

Le caractère sexospécifique de la gestation pour autrui et de la maternité rend vulnérables tant les mères porteuses que les mères d’intention. Les femmes infertiles peuvent subir de fortes pressions culturelles à devenir mères, tandis que les couples de même sexe et les parents isolés ne sont souvent pas autorisés à recourir à la gestation pour autrui, car ils ne satisfont pas aux normes communément admises en matière de parentalité. Les mères porteuses peuvent également faire l’objet de critiques motivées par le fait qu’elles brisent le prétendu lien sacré qui existerait entre une femme et le fœtus qu’elle porte. C’est pour cette raison que Josefina a préféré taire sa décision de devenir mère porteuse. « C’est un sujet tabou. Beaucoup de gens prennent peur lorsqu’ils en entendent parler. C’est pour cela que je n’en ai parlé qu’à peu de personnes. D’ailleurs, rares sont ceux dans ma famille à être au courant », indique‑t‑elle.

« La stigmatisation s’est fortement accrue ces dix dernières années », affirme Isabel Fulda, directrice adjointe du Grupo de Información en Reproducción Elegida, une organisation de défense des droits en matière de procréation située au Mexique qui représente les intérêts tant des mères porteuses que des parents d’intention. La législation en matière de gestation pour autrui varie au Mexique. Toutefois, elle s’est généralement durcie au cours des dernières années. « Même si les réformes sont pavées de bonnes intentions au départ et qu’elles visent à mieux protéger toutes les parties, elles ont des conséquences fâcheuses, en particulier pour les mères porteuses », poursuit‑elle. Dans les régions qui ont formellement interdit la gestation pour autrui, « [celle‑ci] est toujours pratiquée, mais de manière clandestine et dans des conditions dangereuses ».

Josefina en a payé les conséquences. « La première agence ne m’avait même pas fait signer de contrat. Un contrat m’aurait protégée et rassurée sur la suite des événements. » Elle est convaincue que les restrictions ne font que repousser un peu plus dans l’ombre cette méthode de procréation, où les agences malhonnêtes prospèrent en l’absence de réglementation et où les mères porteuses elles‑mêmes sont pénalisées.

« Si [cette pratique] était autorisée, on se sentirait davantage en sécurité », précise‑t‑elle.

Selon Sarojini Nadimpally, membre fondatrice de Sama Resource Group for Women and Health en Inde et spécialiste des questions sociales et juridiques relatives à la gestation pour autrui, les États doivent mettre en place des politiques nuancées qui tiennent compte des opinions et des points de vue des personnes concernées, plutôt que des interdictions. « Les mères porteuses et les couples infertiles ont‑ils été impliqués dans l’élaboration des politiques ? Leur a‑t‑on demandé ce qu’ils voulaient voir inscrit dans les politiques ou les lois ? Dans quelle mesure ces dispositions juridiques seront‑elles accessibles aux mères porteuses ? »

Non seulement les législateurs négligent l’expérience des mères porteuses dans l’élaboration des lois, mais la stigmatisation et la répression empêchent de plus en plus les mères porteuses de faire entendre leur voix. « Plus le problème revêt une dimension politique, plus elles sont réduites au silence », ajoute Isabel Fulda. Les véritables histoires des mères porteuses ont été caricaturées, et les mères porteuses rémunérées sont dépeintes comme des victimes, tandis que celles qui ne le sont pas « sont souvent présentées comme des héroïnes qui acceptent de porter un enfant pendant neuf mois et de s’exposer aux risques simplement par altruisme. Les gens ne conçoivent plus que ces femmes pourraient vouloir de l’argent en échange », précise Isabel Fulda.

Josefina ne comprend pas cette distinction entre la gestation pour autrui rémunérée et la gestation pour autrui non rémunérée. Elle conçoit sa grossesse pour autrui autant comme un travail que comme un don. Ce n’est pas la pauvreté qui a motivé sa décision : « À ce moment, je ne me trouvais pas dans une situation économique difficile. J’ai pris cette décision, car je voulais faire autre chose de ma vie, faire une bonne action pour quelqu’un… Je suis moi‑même maman, et je sais à quel point un enfant peut rendre heureux. »

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Le sexe comme gagne-pain

Liana défend les droits des professionnel(le)s du sexe en Indonésie.
Illustration originale réalisée par Naomi Vona ; avec l’aimable autorisation de Liana.

« Ce n’est qu’après être devenue professionnelle du sexe que j’ai vraiment appris que j’avais mon mot à dire et que j’étais maîtresse de mon corps  », explique Liana par l’intermédiaire d’un interprète en Indonésie.

Liana a l’habitude de faire voler en éclats les idées préconçues : ancienne comptable diplômée et issue de la classe moyenne, elle ne correspond pas au stéréotype de la professionnelle du sexe. « Quand mon bébé avait quatre mois, mon mari est décédé », raconte‑t‑elle. Ses revenus n’étaient pas suffisants, l’entreprise familiale marchait mal, et sa sœur avait des difficultés financières.

« Je me suis rendue dans l’un des établissements bien connus de l’industrie du sexe et j’ai postulé pour y travailler », confie‑t‑elle, en soulignant que cela relevait de sa propre décision. « Je l’ai fait en toute indépendance et sans y être forcée. »

Aujourd’hui, Liana est la coordinatrice nationale du réseau OPSI, qui plaide la cause des professionnel(le)s du sexe et leur propose différents services, notamment de santé. Le réseau bénéficie du soutien de l’UNFPA. « En réalité, les professionnel(le)s du sexe présentent une grande diversité », explique‑t‑elle. « Il y a des hommes, des personnes transgenres, et les raisons qui incitent à choisir de se lancer dans l’industrie du sexe varient d’une personne à l’autre. La majorité cherche une source de revenus. »

Monika, en Macédoine du Nord, est devenue professionnelle du sexe après avoir perdu son emploi et divorcé. Elle aussi affirme avec conviction que c’était sa décision. « J’avais 19 ou 20 ans. J’étais assez mûre et assez consciente pour réfléchir à ce que je voulais et à ce que je ne voulais pas. » Aujourd’hui coordinatrice régionale de l’organisation STAR, premier collectif de professionnel(le)s du sexe dans les Balkans et également partenaire de l’UNFPA, elle dit avoir observé que c’est la norme : « La plupart du temps, je suis entourée de professionnel(le)s du sexe qui se sont volontairement lancé(e)s dans cette activité. »

Néanmoins, Liana et Monika reconnaissent toutes deux que la traite à des fins d’exploitation sexuelle (par la force, la coercition, l’escroquerie ou la tromperie) constitue un problème grave au sein de cette industrie. Leurs organisations respectives travaillent en étroite collaboration avec les victimes et les personnes survivantes, qu’elles aident à bénéficier de services et à quitter l’industrie du sexe si tel est leur souhait.

Compte tenu de la prévalence de l’exploitation et des abus, les débats portent en grande partie sur le statut légal du travail du sexe. Partisans de la dépénalisation et opposants invoquent tous deux la nécessité de protéger ces personnes des abus.

Toutefois, aux yeux des opposants, la notion même de consentement dans l’industrie du sexe est problématique. En effet, des études montrent que les personnes qui se lancent dans cette activité sont nombreuses à présenter des vulnérabilités accrues : elles ont souffert de la pauvreté pendant l’enfance, connu la maltraitance et l’instabilité familiale, ou encore rencontré des obstacles pour accéder à l’économie formelle, notamment parce qu’elles n’étaient pas suffisamment instruites (McCarthy et al., 2014). Ces conditions sont considérées comme un facteur compromettant leur consentement libre et éclairé. En outre, une part importante des professionnel(le)s du sexe (estimée entre 20 et 40 %) indique avoir intégré l’industrie du sexe dans l’enfance (Parcesepe et al., 2016), ce qui constitue une violation manifeste de leurs droits fondamentaux.

Les instruments relatifs aux droits fondamentaux se sont attaqués à ces vulnérabilités. La Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes appelle ainsi à prendre « toutes les mesures appropriées, y compris des dispositions législatives, pour supprimer, sous toutes leurs formes, le trafic des femmes et l’exploitation de la prostitution des femmes ». Quant aux protocoles de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, leur définition de l’expression « traite des personnes » englobe notamment « l’offre ou l’acceptation de paiements ou d’avantages pour obtenir le consentement d’une personne ayant autorité sur une autre aux fins d’exploitation ».

Néanmoins, de nombreux défenseurs des professionnel(le)s du sexe avancent que cette focalisation sur la question de la vulnérabilité compromet leur sécurité et leur autonomie. Liana et Monika affirment toutes deux avoir librement choisi de continuer à travailler pour l’industrie du sexe alors même qu’elles gagnaient un revenu décent en dehors de ce secteur.

« Je vous en prie, ne partez pas du principe que la totalité des professionnel(le)s du sexe sont victimes de traite. Il existe des personnes comme moi qui choisissent ce travail de leur plein gré. Personne ne nous manipule », prévient Liana. « Quand on demande aux membres de l’OPSI s’ils souhaiteraient cesser ce travail dans l’éventualité où ils pourraient trouver un autre emploi, la plupart du temps, la réponse est non. » Les autres emplois à la disposition des professionnel(le)s du sexe sont souvent peu rémunérés, explique‑t‑elle, et l’industrie du sexe permet une flexibilité que beaucoup trouvent intéressante. « Ils peuvent gérer eux‑mêmes leurs horaires. Ça leur permet de s’acquitter de leurs obligations sociales et d’être plus proches de leurs enfants. »

Le travail du sexe, ou en tout cas certains de ses aspects (la coordination, par exemple), est illégal dans la majorité des pays, selon le Réseau mondial des projets sur le travail du sexe. Liana et Monika estiment que ces lois ont pour seul effet de condamner la profession à la clandestinité, une situation dans laquelle les professionnel(le)s du sexe ont plus de mal à repérer les clients violents. Elles assurent que cette criminalisation expose également les professionnel(le)s du sexe aux arrestations, les rendant moins susceptibles de dénoncer d’éventuels agresseurs. En outre, les professionnel(le)s du sexe sont parfois victimes de harcèlement et d’abus de la part de certains policiers qui, « sachant que le travail du sexe n’est pas légal, se disent qu’on ne pourra pas les dénoncer et qu’on sera abandonné(e)s à notre sort », alerte Monika.

Ce qu’elles veulent, c’est la criminalisation de l’exploitation et des violences sexuelles ainsi que la poursuite de leurs auteurs, et non la pénalisation du travail du sexe. « Le problème de la violence ne touche pas seulement les professionnel(le)s du sexe. Il concerne toutes les femmes et les groupes minoritaires », souligne Liana.

Depuis quelques années, le mouvement visant à dépénaliser le travail du sexe gagne du terrain aux Nations Unies, et de nombreux organismes et programmes, notamment l’OMS et ONUSIDA, y voient un moyen efficace de prévenir la transmission du VIH et de mettre fin à la discrimination à l’égard des populations vulnérables (OMS, 2014 ; ONUSIDA, 2012).

Par ailleurs, les Nations Unies redoublent d’efforts pour éliminer l’exploitation et les abus sexuels. L’institution, préoccupée par les rapports d’exploitation entretenus par certains soldats de la paix et travailleurs humanitaires avec des professionnel(le)s du sexe et des personnes vulnérables et marginalisées, a renforcé la surveillance de l’application des règles interdisant au personnel d’échanger de l’argent, des biens ou des services contre des rapports sexuels, y compris dans les pays où le travail du sexe est légal. D’après les représentants des Nations Unies, il n’y a aucune contradiction entre la position selon laquelle la dépénalisation contribuerait à préserver la santé et les droits des professionnel(le)s du sexe et celle consistant à interdire aux membres du personnel d’acheter des services sexuels, même lorsque cette pratique est légale.

« Le personnel des Nations Unies ne doit participer à aucune activité susceptible de conduire à l’exploitation sexuelle. Cette interdiction ne constitue pas un jugement à l’égard du travail du sexe pratiqué par des adultes informés et consentants, mais nous devons reconnaître que la légalité ne suffit pas à garantir que la participation à l’industrie du sexe est volontaire », explique Eva Bolkart, qui coordonne le travail de prévention de l’exploitation et des abus sexuels mené par l’UNFPA.

Monika et Liana conviennent que la légalité n’est pas suffisante, et estiment que la dépénalisation doit s’accompagner d’une déstigmatisation. Tant qu’on ne traitera pas les professionnel(le)s du sexe avec le même respect et la même dignité que les autres citoyens, ceux‑ci resteront contraints d’exercer dans la clandestinité, une situation propice à la dissimulation des abus. « Nous sommes des parents. Nous avons des parents. Nous avons des familles », argumente Monika. « Il n’y a pas de raison que nous soyons traité(e)s différemment des autres à cause de la profession que nous avons choisie. Le travail du sexe est un travail comme un autre. »

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Apte à faire des choix

Lizzie Kiama est une défenseuse infatigable des droits des personnes handicapées.
Illustration originale réalisée par Naomi Vona ; avec l’aimable autorisation de Lizzie Kiama.

En 1999, Lizzie Kiama prenait les transports en commun pour se rendre à son travail à Mombasa (Kenya) lorsque son minibus est entré en collision frontale avec un autre véhicule. « J’étais assise à l’avant, se remémore‑t‑elle. L’accident m’a laissée handicapée. » Pourtant, il lui a fallu 11 ans avant d’accepter pleinement cette nouvelle réalité.

« Pendant longtemps, je ne me suis pas considérée comme une personne handicapée, confie Kiama. Et ce, en raison de la connotation très négative systématiquement associée au mot handicapé. »

Sa vie a pris un tournant lorsqu’elle est devenue mère et qu’elle a décidé de contribuer à un monde meilleur pour ses enfants. Elle explique qu’il s’agissait de se reconnaître comme personne handicapée, mais également de redéfinir ce que cela signifiait. Kiama a ensuite fondé This Ability Trust, une entreprise sociale axée sur les droits des personnes handicapées. C’est dans ce cadre qu’elle a pu observer les nombreuses privations de libre-arbitre dont sont victimes les personnes handicapées, en particulier en ce qui concerne leur santé et leurs droits en matière de sexualité et de procréation.

Les personnes souffrant de handicap visuel ou auditif ont rarement accès à des interprètes ou à des documents en braille lorsqu’elles font appel à des services de santé, explique‑t‑elle. Quant aux patients accompagnés d’un aidant, leur intimité et leur confidentialité sont moins respectées. De nombreuses personnes handicapées n’ont que peu de transports accessibles à leur disposition, et beaucoup d’établissements de santé n’ont pas les infrastructures, le matériel ou encore le personnel formé pour les accueillir.

Certaines personnes vivent même des expériences atroces.

« J’ai entendu des témoignages de femmes qui préféraient encore accoucher chez elles plutôt que d’être confrontées aux objections d’infirmières ou de sages-femmes désapprouvant leur désir de grossesse ou de maternité en raison de leur handicap, raconte Kiama. La société, de manière générale, considère les personnes handicapées, et en particulier les femmes, comme asexuelles... Des principes tout simples comme la capacité juridique, l’autonomie corporelle ou le droit de prendre des décisions ne sont pas considérés comme la norme. »

Au Kenya, les femmes et les filles handicapées sont particulièrement soumises à la violence basée sur le genre (Salome et al., 2013). Mais trop souvent, la réaction à ce phénomène consiste à bafouer encore plus leur autonomie corporelle, déplore Kiama. « Dans certains cas, sous prétexte que des filles handicapées sont constamment victimes de violences sexuelles, leurs familles s’entendent avec le corps médical pour les stériliser afin de les « protéger », explique‑t‑elle. Les auteurs de ces violences ne sont, quant à eux, pas inquiétés le moins du monde. »

Ces problèmes ne sont en aucun cas propres au Kenya. Presque partout, les personnes handicapées sont confrontées à de sérieux obstacles dès lors qu’elles souhaitent prendre des décisions concernant leur santé sexuelle et reproductive.

En Mongolie, par exemple, il a été signalé que des agents de santé pratiquaient des avortements sur des femmes handicapées sans les consulter. Les médecins se contentaient en effet de demander le consentement des tuteurs de ces patientes, selon Enkhjargal Banzgarch, travailleuse sociale de l’Association nationale mongole des personnes en fauteuil roulant. Une étude réalisée par l’Association a ainsi révélé que 22 % des personnes handicapées avaient été forcées à recourir à la contraception par des membres de leur famille ou des prestataires de santé.

Refuser la contraception peut avoir des conséquences. Les femmes atteintes d’un handicap intellectuel se voient souvent refuser leurs allocations ou la prolongation de leur statut d’invalidité si elles n’ont pas reçu les doses requises de contraceptifs injectables, précise Mme Banzgarch.

Les personnes handicapées et leur tuteur reçoivent parfois peu, voire pas du tout d’explications, indique Iliza Azyei, représentante adjointe de l’UNFPA en Mongolie, qui a collaboré avec des militants et le ministère de la Santé pour soulever ces questions.

Elle évoque ainsi l’histoire d’une jeune fille : « Dès qu’elle a eu 16 ans, le médecin chargé de la santé publique est venu chez elle et a commencé à lui administrer des contraceptifs injectables tous les trimestres. » Mme Azyei a demandé à la mère de la jeune fille si elle avait contesté ce qui se passait. Celle‑ci a répondu « Non, je fais confiance à mon médecin. »

Il y a néanmoins des raisons d’être optimiste.

« Du point de vue du plaidoyer, les politiques et le cadre juridique ont progressé », affirme Kiama, en évoquant la loi sur le handicap adoptée au Kenya en 2003, la Constitution du pays, la ratification des conventions internationales relatives aux droits des personnes handicapées, et la prise en compte croissante de l’accessibilité dans les normes de construction.

La Mongolie a également enregistré des avancées. Une étude menée en 2015 sur le respect des droits fondamentaux dans le pays a mis en lumière des violations des droits des personnes handicapées en matière de santé reproductive. Le Gouvernement « a immédiatement procédé à la révision de l’arrêté ministériel sur la santé afin que des services de santé sexuelle et reproductive soient dispensés aux femmes, y compris aux femmes handicapées », explique Mme Azyei.

« L’évolution des politiques n’est qu’une étape, ajoute‑t‑elle. Mais comment modifier les pratiques en vigueur ? »

Les experts s’accordent à dire que, pour y parvenir, les mentalités doivent évoluer également. « Les femmes handicapées ont le droit de tomber amoureuses, d’avoir un bébé, de bénéficier de services et de vivre leur vie », insiste Mme Azyei.

Les personnes handicapées doivent être protégées des abus sexuels, mais par des mesures qui tendent à favoriser – et non pas réduire – leur autonomie corporelle. Il faut également leur donner les moyens de revendiquer leurs droits.

« En tant que personnes handicapées, on a l’impression d’avoir besoin qu’on nous prenne par la main et de devoir demander la permission », déplore Kiama. Cependant, elle observe une évolution au sein de la jeune génération de personnes handicapées. « On voit de plus en plus de jeunes femmes qui occupent l’espace et utilisent les médias sociaux à des fins de plaidoyer. Elles défendent nos droits en matière de sexualité et de procréation de différentes manières, et c’est extraordinaire. »

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Premièrement, ne pas nuire

Suraya Sobhrang raconte comment les membres du corps médical et les fonctionnaires de l’appareil judiciaire ont perpétué la pratique des tests de virginité non consentis en Afghanistan.
Illustration originale réalisée par Naomi Vona ; photo : © UNFPA/A. Mohaqqeq.

Les tests de virginité violent les droits fondamentaux et la dignité des personnes, comme l’ont résolument affirmé les Nations Unies. Pratiqués sans consentement, ils constituent une forme de torture et de violence sexuelle. En outre, ils n’ont aucun fondement scientifique et enfreignent la déontologie médicale (OMS et al., 2018). Cependant, ils restent en vigueur partout sur la planète. La poursuite de cette pratique a récemment fait la une des journaux au Royaume‑Uni, par exemple, où une loi visant à l’interdire est en cours d’examen. Les tests de virginité sont utilisés pour contraindre ou encourager les femmes et les jeunes filles non mariées à l’abstinence, sous prétexte de préserver leur « pureté » et l’« honneur » de leur famille, de prévenir la transmission du VIH, ou encore d’éviter les grossesses chez les adolescentes (Olson et García-Moreno, 2017). Pourtant, bon nombre des défenseurs de cette pratique se prévalent d’arguments féministes pour justifier sa perpétuation.

Un test de virginité, également appelé inspection de l’hymen ou « test des deux doigts », consiste généralement à examiner l’hymen, une fine membrane souvent (mais pas systématiquement) présente dans le vagin. Ce test repose sur le présupposé selon lequel les caractéristiques de l’hymen ou du vagin permettraient de déterminer si une femme ou une jeune fille a déjà eu un rapport vaginal, une croyance totalement discréditée par de nombreuses études médicales. Les examens non scientifiques visant à « prouver » l’existence ou l’absence de relations sexuelles ont pour seul effet de renforcer des normes sociales néfastes et doivent être interdits, selon les experts médicaux et les spécialistes des droits fondamentaux. Ces examens englobent non seulement les tests de virginité, mais également les examens anaux forcés, qui consistent à insérer des doigts ou des objets dans l’anus d’un homme ou d’une femme transgenre, prétendument afin d’obtenir la « preuve » d’un comportement homosexuel. Des tests anaux forcés ont ainsi été signalés dans l’ensemble des États arabes ainsi que dans les régions d’Afrique de l’Est et australe. Ces pratiques n’ont pourtant « aucune valeur médicale » et constituent « une forme de torture ou de mauvais traitements », a déclaré un expert indépendant du Conseil des droits de l’homme des Nations unies dans un rapport publié en 2018 (CDH, 2018).

Les tests de virginité, de même que les examens anaux forcés, sont des procédures invasives, douloureuses et stigmatisantes. Suraya Sobhrang, médecin et ancienne commissaire aux droits de la personne en Afghanistan, affirme que ces tests étaient généralement prescrits de façon punitive après tout acte perçu comme une transgression (le fait de s’asseoir à côté d’une personne du sexe opposé, par exemple), « laquelle constituait un "crime contre la morale" », précise‑t‑elle.

Cet examen se déroulait souvent dans de mauvaises conditions sanitaires et dans des lieux non privés, et les femmes pouvaient être forcées de s’y soumettre plusieurs fois. « Ces femmes ont été traumatisées… L’une d’entre elles m’a avoué que la deuxième fois, elle avait eu l’impression de vivre un viol. »

Les femmes pouvaient être emprisonnées si leur test de virginité n’était pas concluant. « Après cet examen, certaines femmes se sont immolées par le feu », se remémore le Dr Sobhrang. D’autres ont été assassinées par leur famille.

Le Dr Sobhrang et ses collègues ont plaidé en faveur de l’interdiction, en 2018, des tests de virginité non consentis en Afghanistan. Aujourd’hui, en Afghanistan, les tests de virginité ne peuvent être réalisés que sur décision de justice et avec le consentement de la patiente. Toutefois, cette loi n’est pas toujours respectée, en particulier dans les zones rurales. Par ailleurs, les médecins et les patients qui refusent cette pratique courent toujours le risque de subir des représailles. Mozhgan Azami, spécialiste en médecine légale à Kaboul, se souvient d’une fille qui a refusé l’examen deux fois, malgré la décision judiciaire. « La troisième fois, la justice nous l’a renvoyée en nous disant que si les médecins ne pratiquaient pas l’examen cette fois‑ci, ils seraient mis en examen. Après deux heures de discussion, nous avons donc convaincu la fille de se soumettre au test. »

Le Dr Azami admet que les tests de virginité peuvent « nuire à la santé mentale [des femmes] », en particulier lorsque ceux‑ci sont réalisés sous la contrainte. Pourtant, elle défend la pratique de cet examen dans certains cas, lorsque celui‑ci est effectué de façon confidentielle, dans le respect de la dignité de la patiente et avec son plein consentement éclairé. Cette position est motivée par des craintes réelles et des constats implacables : dans les régions où les procédures médicales validées scientifiquement, à l’instar des tests ADN, n’existent pas, les tests de virginité constituent l’un des seuls moyens pour les survivantes de prouver le viol. « L’examen de l’hymen est un moyen qui peut permettre à la victime de réclamer justice et de se défendre face aux reproches de la communauté », poursuit le Dr Azami.

Dans les régions où la perte de virginité est considérée comme une condamnation à mort, ce test peut également permettre aux femmes d’échapper à des violences si la virginité est établie. « À la nuit de noces, on donne aux époux un tissu ou un papier de couleur blanche qui devra être taché du sang de l’hymen pour prouver que le mariage a été consommé », ajoute le Dr Azami. Si « l’époux n’observe aucun signe de perte de virginité, un test de virginité sera effectué… à la demande de la fille », généralement dans l’espoir de montrer que son hymen a bien été déchiré.

Dans certaines communautés, comme dans la province du KwaZulu-Natal en Afrique du Sud, certaines personnes considèrent le test de virginité comme un moyen de prévenir la grossesse des adolescentes, le VIH et d’autres risques (CDH, 2016). « On considère que le test de virginité permet d’éviter que les “iintsizwa” [hommes plus âgés] agressent sexuellement ou violent les filles, en particulier celles qui sont au lycée », affirme Msingaphansi, dirigeant de la ville d’Umzimkhulu, située dans la province du KwaZulu-Natal. D’après lui, ces tests, dont la plupart sont réalisés par des femmes âgées, rappellent l’importance culturelle de l’abstinence et encouragent ainsi les filles à rejeter les avances de leurs pairs et à retarder le début de l’activité sexuelle. Pour Msingaphansi, ce rituel permet d’autonomiser les filles : « Après le test, on informe les filles de leurs droits », déclare‑t‑il, ajoutant qu’elles apprennent à détecter les relations au sein desquelles elles risquent d’être exploitées. Pourtant, ces tests sont rarement consentis, et donc illégaux. « Ce sont les parents qui décident », admet une personne pratiquant cet examen dans les districts d’uMgungundlovu et d’uThukela.

En dépit de ces justifications, les tests de virginité alimentent la fausse croyance selon laquelle la vertu d’une femme se mesurerait à sa vie sexuelle, et perpétuent une conception erronée de l’anatomie humaine. Le Dr Sobhrang souligne que toute crédibilité donnée à ces tests porte inévitablement préjudice aux femmes. « Certaines femmes n’ont pas d’hymen. Et celui‑ci est parfois très élastique. J’ai rencontré une femme qui venait d’avoir son premier bébé, et à l’accouchement, son hymen était toujours intact. [Cet examen] ne constitue donc pas un moyen fiable pour déterminer si une femme a déjà eu une relation sexuelle ou non. »

La médecin explique que si une femme déclare avoir subi un viol, mais que son hymen est toujours intact, elle court le risque d’être emprisonnée pour avoir porté de fausses accusations, tandis que son agresseur reste libre. En outre, le test de virginité ne se substitue pas à l’examen médical d’une survivante d’un viol, qui permet d’évaluer et de soigner les traumatismes physiques et ne nécessite pas d’insérer quoi que ce soit à l’intérieur du vagin (OMS et al., 2018).

« Il s’agit d’une violation des droits fondamentaux, contraire à la dignité humaine », affirme Sima Samar, médecin et ancienne ministre chargée des droits fondamentaux en Afghanistan, qui a également soutenu l’interdiction des tests de virginité non consentis. « Il faut sensibiliser tout le monde, et en particulier les jeunes. Ensuite, je pense qu’il faut sensibiliser la police, les procureurs et les médecins. »

Mais surtout, il faut informer les femmes de leur droit de disposer de leur corps et les encourager à revendiquer leur autonomie corporelle, pour reprendre les propos du Dr Samar. Et d’ajouter : « Combien d’entre elles connaissent leurs droits ? »

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Quoi qu’en dise la loi : la réalité des inégalités d’accès à l’avortement

Quel que soit le statut légal de l’avortement, les femmes aisées trouvent généralement un moyen d’y avoir accès, tandis que les femmes défavorisées sont exposées à de graves risques.
Illustration originale réalisée par Naomi Vona ; photo de JESHOOTS (Unsplash).

« Un jour, une femme a été amenée d’un village isolé ; elle était dans un état très grave... Elle avait essayé de provoquer elle‑même un avortement », se souvient Nuriye Ortayli, gynécologue-obstétricienne en Türkiye dans les années 1980 et 1990. « Aussi bien parmi les jeunes internes que parmi le personnel plus expérimenté, nous avons fait ce qui était en notre pouvoir pendant bien plus de 12 heures... près de 24 heures. On a tenté tout ce qu’on a pu. Mais elle est décédée. »

Pourtant, le témoignage du Dr Ortayli ne concerne pas un avortement illégal pratiqué clandestinement. À l’époque, des services d’avortement médicalisé étaient légalement disponibles en Türkiye. « Si elle avait pu venir à l’hôpital... on aurait pu procéder sous anesthésie locale », explique‑t‑elle. Au lieu de cela, ce qu’elle raconte témoigne d’une réalité à laquelle se heurtent des femmes et des prestataires de santé du monde entier : des avortements sont pratiqués, souvent, même dans les endroits où cette procédure fait l’objet d’importantes restrictions ou est illégale (Bearak et al., 2020), et les femmes sont régulièrement empêchées de bénéficier d’un avortement médicalisé, même dans les régions où cette pratique est légalement autorisée (Gerdts et al., 2015). Par conséquent, quelle que soit la législation, ce sont souvent d’autres facteurs (ressources économiques, distance des services ou normes sociales, par exemple) qui déterminent si une femme pourra accéder à un avortement médicalisé.

Le Dr Ortayli a été témoin de ce phénomène à la fois en tant que médecin en Türkiye et en tant que responsable de programme et conseillère en santé reproductive auprès d’organisations actives dans le domaine de la santé, parmi lesquelles l’UNFPA, en Europe de l’Est, au Moyen‑Orient, en Afrique de l’Ouest et dans les Amériques. « On voit ça sans arrêt. Peu importe le statut légal de l’avortement dans un pays, les femmes prennent cette décision et trouvent un moyen de la mettre à exécution », confie‑t‑elle. « Les plus aisées parviennent en quelque sorte à rester en meilleure santé que les autres, parce qu’elles ont des opportunités, de l’argent, un réseau. Celles qui sont économiquement, socialement ou culturellement défavorisées souffrent davantage. »

Même lorsque l’avortement était strictement interdit dans quasiment toutes les circonstances en Irlande, un grand nombre de femmes souhaitant bénéficier de cette procédure ont pu se rendre à l’étranger afin de l’obtenir. « Dans bien des cas, si les femmes étaient déterminées à subir un avortement, elles finissaient par y parvenir », explique Caitríona Henchion, directrice médicale de l’Association irlandaise de planification familiale.

Pour beaucoup de femmes, et même pour la plupart, la loi n’a pas empêché l’avortement, mais a « souvent retardé le moment où elles ont pu y avoir recours », ajoute le Dr Henchion. « Toute cette période d’attente générait beaucoup de stress et d’anxiété... [et] augmentait évidemment les risques liés à la procédure. »

Selon elle, seul « un groupe relativement réduit » n’a pas été en mesure de se rendre à l’étranger pour se faire avorter. Il s’agissait en particulier « de femmes qui ne parlaient pas bien l’anglais, d’étrangères qui, n’ayant pas la pleine citoyenneté, ne pouvaient pas [quitter le pays et y revenir facilement], d’adolescentes potentiellement tributaires du consentement de leurs parents, de personnes n’ayant absolument pas les moyens de voyager... ou de femmes qui n’avaient personne à qui se confier [au sujet de leur grossesse] ou ne connaissaient personne susceptible de leur venir en aide. »

Bien que le Dr Henchion n’ait pas été en mesure de pratiquer des avortements à l’époque, elle pouvait cependant assurer des soins post-avortement, en général après que les femmes avaient obtenu des pilules de manière illégale afin de provoquer un avortement médicalisé. « Dans la plupart des cas, cette méthode est sûre et efficace et les femmes ne rencontrent pas de problèmes ou de complications », explique‑t‑elle, si bien que seule une fraction des avortements pratiqués de cette manière ont été portés à l’attention du système de santé. Pourtant, il était « relativement fréquent » de recevoir des patientes présentant des saignements abondants ou prolongés et « [...] des femmes qui avaient peut‑être pris des pilules abortives chez elles à un stade de gestation plus avancé qu’elles ne le pensaient ou qu’elles n’auraient dû l’être pour pouvoir recourir à cette méthode ».

Ces circonstances étaient difficiles pour les médecins, se souvient le Dr Henchion. Parfois, les patientes la suppliaient de leur fournir des informations sur l’avortement ou de les orienter vers des services qu’elle n’était pas en mesure de proposer légalement. Au bout du compte, les réglementations semblaient produire des résultats tangibles pour les personnes qui disposaient d’argent et de ressources, mais il en était autrement pour celles qui n’en avaient pas. « C’est ce que j’ai toujours ressenti », affirme‑t‑elle. Le Dr Henchion a été l’une des principales partisanes de la légalisation de l’avortement en Irlande, qui a été adoptée à la suite d’un référendum en 2018.

Mais aujourd’hui encore, les personnes les plus défavorisées continuent de se heurter à des obstacles plus importants et de courir des risques plus élevés. « Certaines régions du pays ne disposent pratiquement d’aucun accès aux services compétents », indique le Dr Henchion. Certaines femmes doivent encore se déplacer pour avoir accès à un avortement sûr, donnant lieu à des délais et à des coûts supplémentaires. Les immigrées sans papiers et les personnes qui ne parlent pas l’anglais continuent également à être confrontées à des difficultés.

Le Dr Ortayli évoque des frustrations similaires : « J’ai exercé en cabinet privé pendant sept ou huit ans à Istanbul et je recevais beaucoup de patientes de la région du Golfe, où [l’avortement] est plus difficile d’accès. Bien entendu, ces femmes étaient celles qui pouvaient se le permettre. » Elle avait conscience que les femmes vulnérables de son propre pays luttaient alors pour bénéficier du même niveau de soins, que ce soit en raison de la distance qui les séparait des services ou des règles relatives à l’autorisation du conjoint. « J’ai vu des hommes se servir de la législation comme d’une arme envers les femmes, par exemple, lorsqu’une femme veut divorcer mais qu’elle tombe enceinte et que son mari ne la laisse pas avorter pour la retenir. »

Elle se félicite néanmoins que la possibilité d’interrompre une grossesse soit proposée en Türkiye, même si les conditions d’accès sont inégales. Elle se rappelle avoir été affligée par le décès d’une de ses patientes à la suite d’un avortement dangereux. Un médecin plus expérimenté lui avait raconté que la situation était encore pire auparavant. « Il disait qu’avant la libéralisation légale [de l’avortement], dans le même service, nous perdions des femmes comme elle, peut‑être deux ou trois chaque semaine. »

Et paradoxalement, selon le Dr Henchion, la légalisation de l’avortement en Irlande a donné à de nombreuses femmes une possibilité supplémentaire, celle de changer d’avis. Auparavant, lorsque les femmes devaient se rendre à l’étranger pour avorter, elles pouvaient se sentir obligées de se soumettre à la procédure après avoir consacré du temps et des ressources à son organisation. « La pression à laquelle elles étaient confrontées lorsqu’il s’agissait de prendre la décision était considérable... C’était leur seule chance de décider ou non de le faire. » Mais aujourd’hui, ajoute‑t‑elle, « on peut réellement donner aux patientes toutes les informations dont elles ont besoin et leur laisser suffisamment de temps pour qu’elles puissent réfléchir ».

Selon elle, ces changements sont d’autant plus importants à l’heure actuelle dans le cadre de la pandémie de COVID-19. « Dans le contexte actuel, avec les limitations de déplacement [liées à la pandémie], nous serions confrontés à une situation extrêmement préoccupante si nous n’avions pas légalisé l’avortement au moment où nous l’avons fait... Il y a eu beaucoup de cas de grossesses non désirées à cause de la COVID-19, chez des personnes qui ont peut‑être perdu leur emploi ou dont la situation a radicalement changé, et elles ont toujours accès à ces services. »

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Mon corps une approche pédagogique

Olga Lourenço fait bien souvent face à des résistances lorsqu’elle dispense des cours d’éducation complète à la sexualité, mais cela ne l’arrête pas.
Illustration originale réalisée par Naomi Vona ; photo : © UNFPA/C. Cesar

Rares sont les parents ou les chefs de communauté à s’opposer à ce qu’un(e) élève ramène à la maison un manuel de chimie ou de mathématiques. Pourtant, les leçons d’éducation complète à la sexualité proposant des informations précises et adaptées à l’âge de chacun sur son propre corps, la santé sexuelle et reproductive et les droits humains, abordent des sujets bien souvent considérés comme tabous. De nombreuses écoles n’enseignent pas cette matière ou ne fournissent que des informations incomplètes. Les élèves sont donc à la fois mal informés des changements que subit leur corps et mal préparés pour se protéger des dangers.

« Nous luttons constamment pour inclure ce sujet dans le programme scolaire », explique Olga Lourenço, coordinatrice pour le Projet CAJ, un programme soutenu par l’UNFPA qui aide les jeunes Angolais à développer des compétences pratiques et leur prodigue une éducation complète à la sexualité. « Presque rien n’est dit sur la santé sexuelle et reproductive à cause de nos tabous et préjugés. »

Les opposants à l’éducation complète à la sexualité prétendent souvent que celle‑ci favorise l’activité sexuelle, même si des études ont infirmé cette hypothèse. Les faits indiquent plutôt que cette éducation, lorsqu’elle est dispensée selon les normes internationales, enrichit les connaissances des jeunes et constitue une stratégie à la fois essentielle et peu coûteuse pour prévenir les grossesses non désirées et les infections sexuellement transmissibles, y compris le VIH. Certaines études montrent qu’elle pourrait même contribuer à retarder les premiers rapports sexuels des adolescents (UNESCO, 2016).

Olga Lourenço raconte que, faute d’informations précises lorsqu’elle était jeune, elle s’était sentie obligée de s’engager dans des relations sexuelles avant d’être prête, à l’âge de 15 ans. « Mes copines avaient déjà des petits amis. Elles étaient déjà actives sexuellement. Elles se moquaient de moi parce que j’étais la “pucelle du groupe” », poursuit‑elle. « Cela m’a en quelque sorte affectée psychologiquement... Je pense que, d’une certaine manière, cette expérience a porté atteinte à mon autonomie corporelle. »

Dipika Paul, chercheuse de longue date sur la santé sexuelle et reproductive et conseillère chez Ipas à Dhaka, au Bangladesh, a pu constater les conséquences du faible accès à l’éducation sexuelle dans sa propre communauté. « Pendant ma scolarité, lors de ma septième année, il n’y avait qu’un seul chapitre consacré à l’éducation sexuelle : celui sur la menstruation », se souvient‑elle. « Le professeur lui‑même ne se sentait pas à l’aise pour nous enseigner cette section. »

En l’absence d’une éducation complète à la sexualité, les jeunes sont exposés aux fausses croyances et à la désinformation. Les garçons et les hommes en particulier « [...] ont des lacunes et entretiennent des idées fausses », affirme la chercheuse, expliquant qu’elle a vu des hommes interdire à leurs femmes d’utiliser des moyens de contraception en raison de la croyance selon laquelle « [...] un stérilet se déplace dans le corps... ils pensent pouvoir ressentir des douleurs à cause d’un stérilet. C’est faux. »

Les élèves qui bénéficient d’une éducation complète à la sexualité sont non seulement en mesure de faire des choix plus sains en matière de sexualité, mais sont également mieux équipés pour demander de l’aide en cas de besoin. « Les informations que je transmets peuvent radicalement changer la vie d’une personne », affirme Olga Lourenço.

Elle se souvient d’une fille qui, alors qu’elle suivait un cursus d’éducation sexuelle dans le cadre d’un programme de mentorat, a révélé qu’elle avait une plaie chronique à la poitrine, ce qu’elle considérait comme une source d’embarras mais pas comme une urgence. Une autre jeune femme a révélé qu’elle vivait avec un oncle qui avait abusé d’elle sexuellement : « La jeune fille vivait enfermée et ne pouvait parler à personne de peur d’être expulsée du foyer et de se retrouver à la rue. » Les mentors ont réussi à mobiliser des services auprès des deux filles, mais Olga Lourenço reste hantée par ce qui aurait pu se produire : « Si nous n’étions pas intervenus, que seraient‑elles devenues ? »

L’éducation complète à la sexualité peut également jouer un rôle dans la prévention de la violence basée sur le genre. Lorsqu’elles sont enseignées selon les normes internationales, les leçons comprennent en effet des messages sur les droits fondamentaux, l’égalité des genres et le respect dans les relations (UNESCO et al., 2018). Et les experts sont de plus en plus nombreux à appeler à ce que ces informations abordent la prévention de la violence sous l’angle de la responsabilité des auteurs de violences potentiels, et non de celle des victimes et des personnes survivantes (Schneider et Hirsch, 2020).

« Les filles doivent avant tout connaître leurs droits et leurs devoirs au sein de la société », affirme Olga Lourenço, expliquant que cela constitue le fondement de l’éducation complète à la sexualité telle qu’elle l’enseigne. « Il leur faut ensuite comprendre comment fonctionne leur corps afin qu’elles prennent des décisions pour elles‑mêmes et ne laissent pas les autres décider à leur place. »

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