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Les dirigeant·e·s exhortent la communauté internationale à mettre fin au fléau de la violence basée sur le genre
- 26 Septembre 2019
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JUBA/KINSHASA/NEW YORK – Betty* est une survivante. Cette adolescente originaire du Soudan du Sud a repris le contrôle de sa vie et surmonté un terrible acte de violence. Son attitude héroïque n’aurait pourtant pas dû être nécessaire, ont souligné des dirigeant·e·s politiques ce 24 septembre aux Nations unies, lors d’une table ronde sur le thème de la violence basée sur le genre.
Betty avait 16 ans lorsque quatre hommes armés sont entrés par effraction à son domicile et l’ont violée.
« Ses parents l’ont retrouvée inconsciente », a témoigné le Dr Natalia Kanem, directrice de l’UNFPA, à l’occasion de cette table ronde qui s’est tenue en marge de la 74e session de l’Assemblée générale de l’ONU.
Les parents de Betty l’ont amenée dans une structure qui propose des services complets aux survivantes de violences basée sur le genre. Elle y a reçu des soins médicaux et un soutien psychologique, et a pu s’installer dans une résidence protégée dédiée aux survivantes mineures.
Betty a maintenant 17 ans et elle a repris sa scolarité.
« Elle bénéficie toujours d’un soutien psychologique régulier, qui lui permet de poursuivre sa scolarité », précise le Dr Kanem. « En tant que médecin, et surtout en tant que personne, je peux vous dire que ce type de soutien peut sauver des vies ».
Le Dr Kanem souligne que ces services de soutien ne sont pas suffisants.
« Il y a encore énormément à faire en matière de prévention, pour faire en sorte que ces situations ne se produisent tout simplement pas. »
« Les violences faites aux femmes sont un problème persistant, qui touche toutes les cultures et tous les groupes », a déclaré Nunu Kumba, ministre de la Femme, de l'enfant et de la protection sociale, devant les dirigeant·e·s réuni·e·s pour l’événement au siège de l’ONU.
La vulnérabilité des femmes s’accroît beaucoup en temps de crise.
Le Soudan du Sud et la République démocratique du Congo (RDC), deux des pays co-organisateurs de l’événement, sont touchés par des phénomènes de violence sexuelle et basée sur le genre particulièrement répandus, que ce soit dans le cadre des conflits ou une fois qu’ils ont pris fin.
Mme Kumba a expliqué que l’éradication de ces violences demande beaucoup d’efforts dans différents domaines : « des services de soins complets, de santé et de soutien psychosocial » sont essentiels.
Les pays doivent également assurer la justice. « Nous avons commencé à établir des tribunaux spécialisés dans les affaires de violence basée sur le genre, et à convaincre l’armée d’essayer de faire en sorte que ses troupes soient réellement poursuivies », a précisé Mme Kumba.
Des centres de protection des familles, comme celui où Betty s’est rendue, aident les survivantes à avoir accès à tous ces services. Ces centres sont soutenus par le Programme commun contre la violence basée sur le genre, qui associe l’UNFPA, le gouvernement du Soudan du Sud et l’équipe de pays de l’ONU, pour fournir des services complets et gratuits aux survivantes.
Le premier centre de ce type a ouvert à Juba en novembre 2017, et cinq autres ont suivi à Malualkon, Wau, Torit et Bor. Trois autres devraient ouvrir dans l’année à venir.
Services et orientation sont également proposés dans des espaces dédiés aux femmes, au sein des camps de protection. « Ici, les femmes se réunissent aussi pour parler des difficultés qu’elles rencontrent au quotidien. Elles racontent leur histoire et apprennent les unes des autres », a expliqué Nyanger Dak à l’UNFPA il y a quelques mois, dans un espace dédié aux femmes au camp de protection de Bentiu.
Nous devons également « moins tolérer la violence basée sur le genre, en encourageant le dialogue au sein des communautés », a déclaré Mme Kumba.
Ces dialogues débutent souvent par la sensibilisation aux droits de la personne.
« Nous n’avons pas toujours eu conscience de ce droit à ne pas subir de violences », raconte un·e membre de la communauté à l’UNFPA, en RDC. « La violence conjugale a longtemps été considérée comme une preuve de virilité ».
Les discussions communautaires, dont beaucoup sont soutenues par l’UNFPA, aident beaucoup à changer les choses, explique cette personne. « Avant cette action de sensibilisation, lorsque le voisinage était témoin de violences conjugales, personne ne faisait rien. À présent, beaucoup de membres de la communauté, y compris des hommes, signalent les cas de violences conjugales qu’ils voient ».
L’UNFPA forme également des responsables de la santé publique, des fonctionnaires de la justice, des psychologues, du personnel des services sociaux ainsi que des membres des forces de l’ordre à fournir des soins respectueux aux survivantes de violences et à les aiguiller vers des services globaux adaptés.
« Ces formations ont été très bénéfiques pour nos équipes », raconte un membre d’une équipe de santé. « Nous souhaiterions demander la formation de tout notre personnel dans la région, pour que tout le secteur de la santé soit prêt à répondre aux situations de violence basée sur le genre ».
Les centres de protection des familles au Soudan du Sud ont déjà aidé plus de 1 500 survivantes de violence sexuelle et basée sur le genre. Ces centres sont soutenus par le Canada, la Norvège, la Suède, la Suisse et l’Union européenne. Les services de santé sexuelle et d’orientation au sein des camps de protection sont soutenus par le Japon.
En République démocratique du Congo, près de 30 000 personnes ont été informées sur la violence basée sur le genre au cours de sessions de sensibilisation, grâce à des espaces sécurisés et à des services de santé. Cinq espaces sécurisés ont été mis en place dans les régions qui en ont le plus besoin. Ces projets sont financés par le gouvernement japonais.
La table ronde du 24 septembre était également soutenue par le gouvernement canadien, l’UE, l’UNFPA, le PNUD et le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires.
« Partout où nous travaillons, voilà l’engagement que nous devons prendre : rester inébranlables dans notre action », a déclaré le Dr Kanem en conclusion de son discours, « et éradiquer ce fléau une fois pour toutes ».
*Le prénom a été changé pour préserver l’anonymat