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« Mon chez-moi me manque » : des dizaines de milliers de femmes et de filles fuient le conflit et se réfugient en Arménie

Mariam, 16 ans, a fui en Arménie avec sa famille après l’escalade des hostilités dans la région du Karabakh en septembre. © UNFPA Arménie / Aspram Manukyan
  • 11 Octobre 2023

VAYOTS DZOR, Arménie – « Je ne savais même pas si mes parents étaient encore vivants. Ç’a été un moment très difficile », raconte Mariam, 16 ans, originaire de Martakert, dans le Karabakh.

Le 19 septembre, on a fait prestement sortir de leur école Mariam et ses camarades lorsque des bombardements ont commencé dans la région,  qui est au cœur de décennies d’un conflit territorial opposant l’Arménie à l’Azerbaïdjan.

Arrivée dans un refuge de la capitale régionale, Mariam a tenté de joindre ses parents, mais il n’y avait plus de réseau mobile. Trois jours plus tard, ils sont arrivés en compagnie d’autres personnes du village de Mariam, dont certaines avaient effectué les 50 kilomètres depuis Martakert à pied, à cause d’une pénurie de carburant.

Il leur a fallu trois jours de plus pour parvenir à passer la frontière arménienne. Dans un camp-dortoir de Vayots Dzor, Mariam déclare à l’UNFPA : « mon chez-moi me manque ».

Au moins 100 000 personnes dont la jeune fille fait partie, principalement Arméniennes de souche, ont fui vers l’Arménie après l’escalade des hostilités qui a eu lieu les 19 et 20 septembre derniers. Près d’un tiers de ces réfugié·e·s auraient moins de 18 ans, et la moitié environ sont des femmes et des filles.

En cas de crise, leurs besoins sont différents de ceux des hommes et des garçons, mais restent souvent sans réponse.

Perturbation de l’accès aux soins essentiels

Lorsqu’une catastrophe survient, ses conséquences affectent en général plus fortement les femmes et les filles.

Le conflit et le déplacement exposent les femmes à un risque accru de violence basée sur le genre, et on estime que 60% des décès maternels évitables se produisent dans les zones touchées par des conflits politiques, des déplacements ou des catastrophes naturelles.

Parmi les dizaines de milliers de femmes et de filles réfugiées en Arménie, on pense que 2 000 sont enceintes, et que 700 accouchements devraient avoir lieu dans les trois prochains mois.

Les crises mettent en péril l’accès au matériel dont les mères ont besoin pour survivre et s’épanouir pendant leur grossesse et leur accouchement. Pour répondre à ce problème, l’UNFPA fournit à des structures de santé dans trois régions d’Arménie des kits de santé reproductive, qui contiennent suffisamment de produits de santé sexuelle et reproductive pour couvrir les besoins de 150 000 personnes.

L’agence a aussi formé 35 prestataires de santé de la région en matière de soins spécialisés aux survivantes de violence basée sur le genre. Deux espaces sûrs, où femmes et filles peuvent avoir accès à une aide psychosociale, à des soins de santé et à une assistance juridique sont déjà opérationnels, et trois autres devraient bientôt suivre.

« L’UNFPA [est] sur le terrain depuis le premier jour, afin de prendre en charge l’arrivée de 100 000 personnes », souligne dans une interview Emmanuel Roussier, coordonnateur de l’aide humanitaire pour l’intervention d’urgence de l’UNFPA en Arménie. « Nous travaillons avec tous nos partenaires sur le terrain pour faire en sorte de fournir aux femmes et aux filles des espaces sûrs, où elles peuvent raconter leur histoire et bénéficier des services dont elles ont besoin. »

Un avenir plus radieux pour les filles

Au camp-dortoir de Vayots Dzor, Mariam porte un sweat arborant l’inscription « Believe in yourself and trust because [you’re] special », ce qui signifie : « crois en toi et fais-toi confiance, car tu es spéciale ».

Mariam fait partie des 600 millions d’adolescentes qui peuplent notre planète, et qui, selon une enquête récente menée par le Partenariat pour la santé de la mère, du nouveau-né et de l’enfant, rêvent d’un avenir dans lequel elles pourraient apprendre et s’épanouir au sein d’un environnement sûr et encourageant.

« Toutes les filles naissent avec un potentiel infini – celui d’apprendre et de s’épanouir, de diriger, d’inspirer les autres et de changer le monde », a déclaré la directrice exécutive de l’UNFPA, la Dr Natalia Kanem, à l’occasion d’un communiqué pour la Journée internationale de la fille. « Nous devons cependant agir plus vite et prendre des mesures plus fortes pour que chaque fille, où qu’elle vive, grandisse dans la certitude que son corps lui appartient, que son avenir est bien à elle, qu’elle a la possibilité d’aller à l’école et de bénéficier des soins de santé dont elle a besoin, et qu’elle a le droit de vivre libre de toute violence. »

Avant que la famille de Mariam ne fuie sa ville natale, cette jeune fille de 16 ans aimait beaucoup fréquenter un centre éducatif de Matakert, pratiquer la photographie, créer des animations et des jeux en ligne.

Elle ignore si elle pourra reprendre des études de ce type, tout comme on ignore, selon des responsables des Nations Unies, si les ex-habitant·e·s du Karabakh choisiront ou non de retourner s’y installer.

Malheureusement pour la famille de Mariam, elle n’a pas de maison à retrouver. « On m’a dit que notre maison avait été bombardée, comme beaucoup d’autres dans mon village », déplore-t-elle. « Je n’ai rien emporté avec moi car on nous a emmené·e·s directement de l’école au refuge. Je n’ai même pas pu faire mes adieux. »

 

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