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Philippines : la baisse des taux de mortalité maternelle ne suffit pas pour atteindre les OMD

Les femmes vivant dans les zones rurales sous-développées des Philippines sont exposées à un risque de mourir en couches bien plus élevé que les femmes des zones urbaines.
  • 07 Avril 2009

MANILLE – Selon les spécialistes de la santé, des milliers de femmes continuent à mourir aux Philippines en raison de complications liées à l’accouchement.

Des données des Nations Unies révèlent qu’environ 230 femmes meurent pour 100 000 naissances vivantes aux Philippines, contre 110 en Thaïlande, 62 en Malaisie et 14 à Singapour.

Les causes de la mortalité maternelle sont les hémorragies, les infections, la dystocie, l’hypertension pendant la grossesse et les complications liées à des avortements à risque, dont la plupart peuvent – d’après les spécialistes – être prévenues grâce à des diagnostics et des interventions appropriés.

« Le taux de mortalité maternelle aux Philippines est l’objectif du Millénaire pour le développement dont la probabilité d’être atteint en 2015 est la plus faible », confie Vanessa Tobin, représentante de l’UNICEF aux Philippines, à IRIN. Le pays présente un taux de mortalité maternelle ajusté de 160 décès pour 100 000 naissances vivantes, ce qui est loin de l’objectif de 55-60 décès pour 100 000 naissances vivantes.

La mortalité maternelle demeure un problème majeur aux Philippines. Photo : UNFPA/Philippines

« Les progrès sont insuffisants », ajoute-t-elle.

En s’appuyant sur les résultats des enquêtes de santé nationales, Hendry Plaza, responsable du programme de santé reproductive de l’UNFPA, déclare : « Nous ne parviendrons qu’à [atteindre] 140 décès pour 100 000 naissances vivantes en 2015. Statistiquement, nous restons très loin de l’OMD de 55 décès pour 100 000 naissances vivantes. »

« Des efforts concertés doivent être déployés pour promouvoir et accélérer la mise en œuvre d’interventions rentables, comme un meilleur accès aux soins obstétricaux d’urgence, l’augmentation du nombre de naissances dans les établissements de santé et l’accès universel à des services de santé sexuelle et reproductive, notamment de planification familiale », explique M. Plaza.

La présence d’un agent de santé qualifié lors de l’accouchement est essentielle pour réduire la mortalité maternelle.

« Seuls 60 % des accouchements aux Philippines sont réalisés avec l’assistance d’un personnel qualifié, à savoir un médecin, une infirmière ou une sage-femme ayant suivi une formation de 18 à 24 mois en obstétrique. Les accoucheuses traditionnelles [qui n’ont pas reçu de formation officielle] ne sont pas incluses dans cette définition », explique Vanessa Tobin.

« L’objectif intermédiaire pour atteindre l’OMD est que tous les accouchements soient réalisés avec l’assistance d’un personnel de santé qualifié. Faute d’y parvenir, nous ne serons pas en mesure de réduire le nombre de décès maternels dans le pays », ajoute-t-elle.

Santé reproductive

Selon l’enquête sur la planification familiale réalisée en 2006, seules 50,6 % des femmes ont utilisé une méthode de contraception, soit la même proportion que six ans plus tôt.

On estime que 4 500 femmes meurent chaque année de complications liées à l’accouchement. Photo : UNFPA/Philippines

Les préservatifs, la pilule et les autres moyens de contraception modernes sont assimilés à l’avortement, qui est illégal. En conséquence, la plupart des cliniques publiques et situées dans les zones rurales ne distribuent pas de contraceptifs.

La « House Bill 5043 », également appelée « Reproductive Health Bill », préconise une gamme complète de programmes et de services de santé sexuelle et reproductive (éducation, accès universel à des services de planification familiale traditionnelle et moderne).

Cette loi est empêtrée dans des débats législatifs depuis deux décennies, ce qui empêche les femmes, en particulier celles qui ont un revenu plus faible, d’accéder aux services de santé reproductive et d’obtenir des informations à ce sujet.

Disparités régionales

Pour certains spécialistes, les chiffres de la mortalité maternelle ne correspondent pas forcément à la réalité, car la fourniture de soins de santé dans un archipel de plus de 7 000 îles représente un défi de taille.

Les disparités importantes entre les provinces urbaines de Luzon et les provinces sous-développées de Mindanao se reflètent dans leurs taux de mortalité respectifs.

Les données de l’enquête démographique et de santé réalisée en 2003 et de l’enquête sur la planification familiale de 2006 indiquent que dans la région de la Capitale Nationale (qui comprend Manille), 90 % des accouchements sont réalisés avec l’assistance d’un personnel de santé qualifié, alors que cette proportion n’est que de 24 % dans la région autonome en Mindanao musulmane.

« Dans certains cas, une sage-femme est responsable de deux ou trois barangays [les plus petites divisions administratives], séparées les unes des autres par de vastes étendues de mer. C’est pourquoi de nombreuses femmes choisissent de se faire assister d’une accoucheuse traditionnelle issue de la communauté », explique Fatima Pir Allian, directrice de programme pour le Neighbours Population Development Center, Inc., une ONG partenaire de l’UNFPA.

L’inaccessibilité et le manque de personnel sont les principales raisons pour lesquelles Mindanao présente l’un des taux de mortalité maternelle les plus élevés du pays.

Selon Mme Allian, le conflit armé qui dure depuis plus de 30 ans a accentué les problèmes de manque de personnel et d’accessibilité.

-- Reportage réalisé et publié pour la première fois par IRIN

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