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Récits de violence : 16 objets illustrent la réalité de la violence basée sur le genre à travers le monde
- 22 Novembre 2017
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UNITED NATIONS, New York – « Voici ce qui reste de mes dents après avoir été battue par mon mari », a témoigné Ameera* depuis un refuge pour femmes dans le nord-ouest du Yémen.
Ameera nous a montré trois éclats de dents, qu'elle a conservés comme pièces à conviction pour sa procédure de divorce. « Il m'a frappée si fort qu'il a cassé mon nez et mes dents », a-t-elle déclaré aux intervenants de l'UNFPA.
La violence à l'encontre des femmes et des jeunes filles est la forme de violence la plus universellement répandue. Dans le monde entier, il n'est pas une communauté ou un pays qui ne soit frappé par ce fléau. Une femme sur trois doit faire face à des actes de violence au cours de sa vie.
Depuis le mois d'octobre, des millions de femmes provenant de plus de 80 pays ont décidé de sortir du silence et de nous parler de leurs peurs, mais surtout des agressions et des actes de harcèlement qu'elles ont subis. Malgré l'importance de cette démarche, il ne s'agit que d'un coup d'œil furtif sur un problème aussi terrifiant qu'omniprésent.
À compter du samedi 25 novembre, le monde consacrera 16 jours à une campagne annuelle de lutte contre la violence basée sur le genre. À cette occasion, l'UNFPA a réuni 16 photographies d'objets associés à des actes de violence vécus.
Ces objets peuvent être des biens ordinaires, véritables témoins silencieux d'actes de brutalité, ou des instruments utilisés comme armes contre des femmes ou des jeunes filles. Ces photographies nous montrent également des lieux où des femmes ont cherché refuge et, tout aussi symboliquement, des endroits où des hommes violents en quête de rédemption se sont rendus.
Cette série de photographies vise à nous sensibiliser aux parcours de femmes réelles dont la vie a été bouleversée par des actes de violence.
La violence basée sur le genre revêt des formes diverses, telles que la violence psychologique, le dénuement économique, les voies de fait, le viol et la privation de liberté.
En Jordanie, l'UNFPA a interviewé le Dr. Rania Elayyan, spécialiste du traitement des survivantes d'agressions sexuelles. Le Dr. Elayyan parle des séquelles laissées par un viol : En plus des lésions physiques, les survivantes peuvent être amenées à faire face à des conséquences qui bouleversent leur vie, telles que la stigmatisation, la maladie ou une grossesse non désirée. En Bolivie, Carmen* devait se réfugier dans les toilettes de l'université pour échapper au flot incessant de remarques désobligeantes de son petit ami. L'UNFPA a photographié un de ces cabinets de toilettes après que Carmen ait raconté son histoire à des chercheurs de l'université.
Certaines pratiques traditionnelles comme la mutilation génitale féminine (MGF) et les mariages d'enfants sont également nuisibles.
En Somalie, une femme pratiquant le MGF a montré à l'UNFPA les lames qu'elle utilise pour exciser les fillettes. Bien qu'elle sache que cette tradition est dangereuse, elle participe néanmoins à sa perpétuation. À l'échelle mondiale, plus de 200 millions de femmes et de jeunes femmes actuellement en vie ont subi des actes de MGF, sources d'hémorragies et d'infections, voire de décès.
Mirriam, une jeune Zambienne de 14 ans, a été mariée à un homme de 78 ans.
« Immédiatement après avoir payé le « prix de la fiancée » à mes tuteurs, il m'a emmenée chez lui, m'a déshabillée et m'a forcée à coucher avec lui. » a-t-elle déclaré à un conseiller de l'UNFPA à Lusaka. L'UNFPA a photographié les chaises utilisées pendant cette séance de conseil.
Les attitudes négatives à l'encontre des femmes et des jeunes filles sont également un puissant ferment de violence.
Balqees*, une jeune Yéménite, nous a dit avoir été retenue prisonnière chez elle avec sa sœur depuis l'âge de 9 ans. Elles sont restées pendant 20 ans dans une pièce dénuée de tout confort car leurs frères craignaient que les jeunes filles amènent la honte sur leur famille si elles étaient vues en public.
« Les voisins nous donnaient de la nourriture par cette fenêtre et nous ont finalement secourues et amenées à un refuge afin que nous puissions commencer une nouvelle vie. » a déclaré Balqees. Avec sa permission, l'UNFPA et ses voisins ont photographié la maison, aujourd'hui abandonnée, où Balqees et sa sœur étaient enfermées.
Les crises humanitaires ont pour effet d'accroître encore la vulnérabilité des femmes. Les femmes et les jeunes filles peuvent devenir des cibles, voire une monnaie d'échange. L'affaiblissement des systèmes de protection et les tensions extrêmes endurées par les familles peuvent conduire à des flambées de violence domestique.
Dans le nord du Nigéria, Zeinabu, âgée de 22 ans, a été agressée par des combattants du groupe Boko Haram alors qu'elle ramassait du bois. Les hommes ont tiré sur elle, mais elle a réussi à s'échapper. « J'ai tout lâché et j'ai couru aussi vite que possible pour sauver ma vie » a-t-elle déclaré à l'UNFPA.
Certains des récits les plus choquants proviennent du Yémen, un pays dévasté par un conflit d'une brutalité extrême, où les rapports d'actes de violence ont augmenté de plus de 60 %.
Mais même avant le début de la crise actuelle, les protections dont bénéficiaient les femmes et les jeunes filles étaient fragiles. Rawa*, âgée de seize ans, nous a révélé que son père l'attachait à son lit avant de la violer. Il est aujourd'hui sous les verrous et Rawa habite dans un refuge. Avec sa permission, un photographe s'est rendue dans son ancienne maison, aujourd'hui abandonnée, pour y photographier la corde et le lit.
L'UNFPA travaille à l'éradication de la violence basée sur le genre et à la fin de l'impunité qui y est associée avec différents partenaires, notamment des gouvernements, des organisations de défense des droits des femmes et des associations de jeunes.
L'UNFPA soutient des cliniques comme celle où le Dr. Elayyan travaille, afin de proposer des soins rapides et adaptés aux survivantes. Il travaille également avec des refuges tels que ceux dans lesquels Ameera, Balqees et Rawa vivent au Yémen.
L'UNFPA apporte également son soutien à des initiatives visant à modifier les comportements, les attitudes et les pratiques préjudiciables.
Ry, un citoyen cambodgien, regrette les actes de violence perpétrés à l'encontre de son épouse. Depuis qu'il a rejoint l'initiative Good Men Campaign, parrainée par l'UNFPA, il a appris à maîtriser ses accès de colère et à résoudre calmement les conflits. Aujourd'hui, Ry participe à des actions sur l'éradication de la violence basée sur le genre, dans le cadre desquelles il s'adresse à d'autres hommes.
Tous ces efforts se poursuivent sans relâche.
Il y a deux mois, les Nations Unies et l'Union européenne ont lancé l'initiative Spotlight. Dans le cadre de cette action, l'UNFPA, l'ONU Femmes et le Programme de développement des Nations Unies vont unir leurs efforts à l'échelle mondiale, avec pour objectif l'éradication de la violence contre les femmes et les jeunes filles à l'horizon 2030.
Comme l'indique le nom de l'initiative, la première étape consiste à reconnaître pleinement l'ampleur du problème, à mettre ce dernier en lumière et à ouvrir la voie vers l'avenir.
*Nom changé pour préserver l'anonymat