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La vie de 33 femmes transformée après les effets dévastateurs de la fistule obstétricale
- 14 Juillet 2017
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BATOURI, Cameroun – Amina s’est mariée alors qu’elle était encore une enfant. Peu après, elle est tombée enceinte et, à l’âge de 13 ans à peine, a donné naissance à son bébé. Comme c’est le cas pour bon nombre de jeunes filles de son âge, le corps d’Amina n’était pas assez développé pour porter un enfant, elle a souffert d’un accouchement dystocique, une complication extrêmement douloureuse qui aurait pu conduire à sa mort.
Par chance, son enfant et elle ont survécu à l’accouchement mais l’épreuve lui a laissé de graves lésions, connues sous le terme de fistule obstétricale, une brèche de la filière pelvi-génitale due à un travail difficile lors de l'accouchement, causant de l’incontinence et exposant les femmes à une série de problèmes annexes.
Cette condition affecte les femmes les plus vulnérables, engendrant des complications médicales mais aussi sociales. Beaucoup de jeunes filles finissent abandonnées par leur famille, ostracisées par leur communauté.
On estime à plus de 20 000 le nombre de femmes victimes de fistules obstétricales au Cameroun et chaque année, plus de 2 000 nouveaux cas sont recensés dans le pays. Pourtant, dans la majeure partie des cas, cette complication peut être évitée. Dans les pays industrialisés, les cas de fistules ont presque été éradiqués grâce à des soins obstétriques d’urgence.
Pendant dix jours au mois de juillet, une campagne de sensibilisation a eu lieu - en collaboration avec l’UNFPA, le ministère de la santé et la Fondation Orange - afin d’approvisionner la communauté en chirurgie reconstructrice gratuite, en formations pour les professionnels de la santé et en informations préventives afin d’éviter l’apparition de nouveaux cas de fistules obstétricales.
Amina, maintenant âgée de 20 ans, est une des 33 femmes ayant bénéficié de chirurgie réparatrice lors de la campagne de l’UNFPA qui a amené quatre spécialistes camerounais à Batouri, une commune située dans l’est du pays. Les médecins y ont réalisé trois à quatre opérations par jour, suivies de soins post-opératoire d’une durée de 14 à 21 jours.
Il s’agissait d’une opportunité unique pour ces femmes de l’est du Cameroun, qui autrement auraient dû effectuer 700 kilomètres pour rejoindre le centre de réparation chirurgicale spécialisé dans le soin des fistules obstétricales de N’gaoundéré, établi en 2013 par l’UNFPA et la Fondation MTN.
Beaucoup de femmes restent, cependant, encore dans le besoin, admettent des experts sur place.
« Il serait illusoire de croire que le taux de réparations effectuées actuellement puisse endiguer le nombre de patientes encore en attente d’une intervention », explique Barbara Sow, représentante de l’UNFPA au Cameroun.
Pour un impact plus significatif, l’UNFPA et ses partenaires travaillent à augmenter le nombre de centres médicaux capables de réaliser de telles interventions.
C’est dans ce même but que les médecins ayant participé à la campagne de sensibilisation de l’UNFPA, ont formé le personnel de l’Hôpital Catholique de Batouri, dont notamment deux de ses anesthésistes, trois médecins et dix infirmières.
Maintenant que la région dispose désormais d’une équipe qualifiée pour prendre en charge ce type d’interventions post-partum, les femmes n'auront plus besoin d'aller à N'gaoundéré pour se faire operer.
Mais les patientes ayant survécu à une fistule obstétricale, ont également des besoins au-delà de la chirurgie réparatrice. De par leur exclusion de la communauté, la plupart des femmes sont forcées d’abandonner leur emploi, voire leur mode de vie. « Quand j’ai eu cette fistule, les gens ne voulaient plus acheter la nourriture que je vendais à cause de la mauvaise odeur de mon urine et des fuites », se souvient une jeune femme qui a depuis été opérée.
L’UNFPA et Orange offriront également aux patientes atteintes de fistules un petit pécule pour relancer leurs commerces et autres activités génératrices de revenus.
L’UNFPA travaille actuellement à faire passer le message dans les communautés ; les fistules obstétricales peuvent être évitées en assurant un suivi médical de qualité aux femmes enceintes auprès d'un personel qualifié tel qu’un(e) sage-femme, un(e) infirmier, infirmière ou d’un médecin qui pourrait intervenir en cas de complications.
C’est particulièrement important de diffuser ce message auprès des hommes, « étant donné le pouvoir de décision qu’il ont sur leur femme », explique le docteur Sow.
Des intervenants locaux, formés par l’UNFPA, participent pour cette raison aux meetings des « clubs des maris », populaires au Cameroun, où les hommes de la communauté se rencontrent pour discuter de leurs problèmes familiaux. Le message semble prendre racine, estiment les experts sur place. « Il vaut mieux prévenir que guérir », conclut le docteur Sow.
– Olive Bonga (traduit de l'anglais par Manon Jacob)