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La grossesse chez l’adolescente fait figure de mode de vie dans les villages reculés de la RDP lao

Âgée de 16 ans, Tod attend son deuxième enfant. Étant donné que peu d’enfants ont la chance d'être scolarisés, les adolescentes de certains villages isolés du sud de la RDP lao se marient fréquemment à l’âge de 14 ou 15 ans et assument aussitôt la lourde tâche d’élever une famille. Photo©UNFPA Asie-Pacifique
  • 30 Octobre 2013

SAVANNAKHET, République démocratique populaire lao — Les enfants deviennent adultes très vite dans certains villages isolés du sud de la RDP lao. Étant donné que peu d’entre eux ont la chance d'être scolarisés, beaucoup choisissent de se marier à l’âge de 14 ou 15 ans, voire plus tôt, et d’avoir des enfants.

Or, cela peut être dangereux. Pour son premier enfant, lorsqu’elle avait 15 ans, Tod est allée accoucher dans la forêt comme le veut la coutume de son ethnie. Elle a à peine compris ce qui se passait et aucune personne qualifiée n’était là pour l’aider en cas de complications. Tod a survécu mais pas son bébé prématuré.

Tod, qui a maintenant 16 ans, est de nouveau enceinte. Cette fois-ci, une sage-femme de la communauté lui a fait passer un examen prénatal et lui a donné des conseils pour rester en bonne santé. Kiangthong, diplômée d’un nouveau programme du gouvernement visant à former des sages-femmes, passe désormais tous les trois mois dans le village de Tod. La jeune sage-femme a conseillé à cette dernière d’aller accoucher dans une clinique pour ne pas courir de risque.

Mais il est peu probable que Tod suive son conseil, car la clinique se trouve dans un autre village, séparé du sien par deux cours d’eau. Pendant la saison des pluies, le village de Tod est coupé du monde.

« Si nous avions un centre de santé ici, je m’y rendrais », explique Tod. « Mais c’est trop difficile de marcher jusqu’à l’autre village. Je vais certainement accoucher à nouveau dans les bois. »

L’isolement géographique et le manque d’opportunités accentuent les problématiques du mariage d’enfants et de la grossesse chez l’adolescente dans les communautés reculées comme celle de Tod. Ces pratiques ancestrales subsistent bien que les besoins des femmes en matière de santé soient globalement mieux satisfaits aujourd’hui. L’État a notamment construit des infrastructures et déployé des prestataires qualifiés comme Kiangthong dans les régions isolées.

Néanmoins, le taux de natalité reste élevé chez les adolescentes. Chaque année, près de 10 % des adolescentes laotiennes âgées de 15 à 19 ans donnent naissance à un enfant, selon la dernière enquête sur les indicateurs sociaux. Ce pourcentage est bien plus élevé dans les zones reculées, où certaines pratiques culturelles, comme l’accouchement dans la nature, portent préjudice à la santé de la mère et du nouveau-né.

La poursuite de la scolarité est essentielle pour réduire le nombre de grossesses

Fonder une famille est toujours considéré comme une chose « normale » pour les jeunes adolescents de certaines communautés de la RDP lao, particulièrement ceux qui ne sont pas scolarisés. Les parents dont les enfants décident de se marier n’y voient généralement pas d’objection.

Dans le village d’Acheu, peu nombreux sont les enfants qui fréquentent les bancs de l’école plus d’un an ou deux. Pour les grandes classes, il faut aller à l’école d’un autre village. Beaucoup de parents ne voient pas l’intérêt d’y envoyer leurs enfants, et surtout pas les filles, alors qu’ils pourraient participer aux tâches ménagères.

Acheu et son mari ont quitté l’école primaire après la troisième année pour se marier. Elle est tombée tout de suite enceinte et neuf mois plus tard, son premier enfant naissait. Les jeunes parents, aujourd’hui âgés de 17 ans, veulent attendre deux ans avant d’avoir un troisième enfant mais ils ignorent l’existence de méthodes contraceptives modernes et n’utilisent d’ailleurs aucun moyen de contraception.

Vivre de la terre est un défi permanent pour le couple. Tous deux travaillent du matin au soir et s’occupent de leur famille. Ils veulent construire leur propre maison mais en raison de l’appauvrissement des ressources forestières, il devient de plus en plus difficile de se constituer un revenu en ramassant du bois de chauffage.

« Si nous n’avions pas interrompu notre scolarité, nous aurions pu trouver du travail », reconnaît Acheu. « Nous aimerions reprendre nos études mais ce n’est pas possible pour le moment. »

Veiller à ce que les filles poursuivent leur scolarité est crucial pour réduire le nombre de grossesses chez les adolescentes et multiplier leurs opportunités, si l’on en croit l’État de la population mondiale 2013, un nouveau rapport de l’UNFPA sur les défis de la grossesse chez l’adolescente, qui devrait être publié le 30 octobre.

« Si une fille est éduquée, en bonne santé, qu’elle suit une formation et qu’elle se sent en sécurité, elle prendra soin d’elle et investira dans sa famille actuelle et future ainsi que dans sa communauté, et tout cela contribuera finalement à faire de la RDP lao un pays prospère », explique Esther Muia, représentante de l’UNFPA dans le pays.

Pour augmenter le taux de scolarisation dans les villages pauvres comme celui d’Acheu, il faut convaincre les habitants que l’éducation apporte de réels avantages économiques. De plus, si l’on veut améliorer l’éducation dans les communautés ethniques, il faut lever certaines barrières linguistiques et culturelles et surmonter les contraintes géographiques.

« Nous devons améliorer l’éducation primaire ainsi que les établissements d’enseignement secondaire afin que tous les Laotiens réalisent pleinement l’importance de l’éducation comme moyen d’améliorer les conditions de vie et les modes de subsistance », déclare le ministre de l’Éducation et des Sports de la RDP lao, le Dr. Phankham Viphavan.

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