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Expansion des services essentiels de santé reproductive au Soudan, avec des femmes aux commandes

Des femmes de la communauté Shanisha, dans l’État soudanais du Nil-Bleu, s’expriment sur les changements depuis la transition démocratique du pays. © UNFPA Soudan/Sufian Abdul-Mouty
  • 24 Mars 2021

DAMAZIN, Sudan – Farina*, 50 ans, vit dans l’état du Nil-Bleu au Soudan, et ne se souvient plus de l’époque où elle a développé une fistule obstétricale – une blessure liée à l’accouchement qui provoque une incontinence chronique, des infections, et qui mène souvent à l’exclusion par la communauté.

Farina a été mariée alors qu’elle n’était encore qu’une adolescente. Le mariage d’enfants augmente beaucoup le risque d’être confrontée à un travail obstrué, ce qui est souvent mortel sans traitement rapide. Celles qui y survivent, comme Farina, peuvent développer une fistule obstétricale.

Cette expérience terriblement douloureuse se termine souvent par la naissance d’un enfant mort-né.

Farina a connu huit grossesses, qui lui ont donné cinq enfants vivants. Ce n’est pourtant que très récemment qu’elle a pu être soignée pour sa fistule obstétricale qui date sans doute de plusieurs dizaines d’années.

A motorcycle ambulance, called a tuk-tuk, is being provided to the local community.
Une ambulance tuk-tuk, l’une des dizaines qui seront déployées dans tout le Soudan, est remise à un groupe de femmes. © UNFPA Soudan/Sufian Abdul-Mouty

« Aujourd’hui, je me sens à l’aise pour mes activités quotidiennes », explique-t-elle à l’UNFPA à la maternité de Damazin, où elle reçoit des soins.

Améliorer les soins et le transport

La fistule obstétricale est tout à fait évitable avec un traitement rapide et adapté. Sa persistance dans le temps est le signe que les systèmes de santé ne s’occupent pas correctement des femmes. Heureusement, l’accès à des soins de santé maternelle de qualité s’améliore dans cet État rural du Nil-Bleu, ce qui permet aux femmes et aux filles d’avoir de meilleures conditions de vie.

La semaine dernière, la directrice de l’UNFPA, le Dr Natalia Kanem, s’est rendue à Damazin pour remettre à un groupe local de femmes une ambulance à trois roues (un tuk-tuk) toute neuve. Ce tuk-tuk permettra de transporter rapidement les femmes qui en ont besoin jusqu’à la maternité de Damazin.

« Je vous garantis que le groupe de femmes sera seul responsable du tuk-tuk. Ce sont elles qui commandent », a déclaré un cheikh de la région, l’un des anciens qui assistait à la cérémonie d’inauguration.

Cette ambulance tuk-tuk est l’une des 42 qui seront bientôt mises en service dans tout le Soudan, dans le cadre d’un partenariat entre le Fonds central des Nations Unies pour les interventions d’urgence et l’UNFPA, qui soutient également des services tels que la chirurgie réparatrice des fistules obstétricales à la maternité.

Une action tournée vers l’avenir

Cette amélioration du transport vers l’hôpital permettra de changer immédiatement la vie de femmes comme Farina, qui a subi quatre opérations liées à sa fistule et de nombreuses consultations de suivi, demandant chacune des heures de trajet depuis son domicile.

Executive Director Dr. Natalia Kanem holds a newborn baby in the Damazin maternity hospital.
Le Dr Kanem tient dans ses bras un nouveau-né à la maternité de Damazin. © UNFPA Soudan/Sufian Abdul-Mouty

Ou bien de femmes comme Sara*, qui vient juste de donner naissance à un petit garçon dans la même maternité. Elle a dû accoucher par césarienne, mais il lui a fallu prendre les transports en commun pour cela.

Sara est heureuse que son accouchement se soit bien passé et que sa convalescence se déroule bien. Elle a déjà hâte d’avoir un autre enfant. « J’ai à présent trois garçons, et j’espère avoir une fille la prochaine fois », dit-elle avec un grand sourire.

Le Dr Kanem s’est entretenue avec des jeunes mères comme Sara, ainsi qu’avec des sages-femmes et des membres de la communauté pour évaluer leurs besoins.

Dans la région du Nil-Bleu, les décès maternels sont à la fois très nombreux (environ 116 décès pour 100 000 naissances vivantes) et sous-déclarés, mais l’UNFPA travaille avec ses partenaires pour pallier ces lacunes.

L’an dernier, uniquement dans cette région, l’aide de l’UNFPA a entre autres permis 4 000 accouchements médicalisés, l’information de 9 000 personnes sur la prévention de la COVID-19 et la santé en général, le soutien de la planification familiale pour 12 000 personnes, et la formation de centaines de soignant·e·s.

« Le visage du changement est féminin »

Cette visite du Dr Kanem faisait partie d’un tour plus global du pays, au cours duquel elle a pu observer les progrès accomplis dans les droits et la santé sexuelle et reproductive des femmes et des filles lors de la transition démocratique du Soudan.

Le Dr Kanem a également rencontré Abdallah Hamdock, le Premier ministre, le Dr Mariam Al-Mahdi, ministre des Affaires étrangères, ainsi que les ministres de la Santé, du Développement social, de la Jeunesse et des Sports, pour exprimer sa solidarité avec eux dans la promotion de la paix, de la santé et de l’égalité des genres. « Moins de deux ans après la transition, des progrès remarquables ont été accomplis », a observé le Dr Kanem.

Dr. Kanem hands keys to the ambulance to a local woman community leader. Both women are wearing face masks.
Une responsable communautaire prend les clés de la nouvelle ambulance tuk-tuk. © UNFPA Soudan/Sufian Abdul-Mouty

Le Soudan s’est engagé dans plusieurs étapes pour améliorer la condition des femmes et des filles, en adoptant notamment des lois qui criminalisent les mutilations génitales féminines, en abrogeant les lois dites « de moralité » qui restreignaient la liberté des femmes et leurs déplacements, et en adoptant les premières procédures normalisées d’exploitation pour prévenir la violence basée sur le genre et y répondre.

« Le visage du changement est féminin, et il est jeune. Nous félicitons les femmes et les jeunes du Soudan pour leur défense de la démocratie, de la paix et des droits humains pour toutes et tous », a déclaré le Dr Kanem. « Les femmes et les jeunes sont de puissants alliés et acteurs du changement ».

Selon le Dr Kanem, l’un des temps forts de son voyage a été de constater le travail fondamental que font les femmes au sein de leurs communautés, notamment celui du groupe de femmes qui s’assurera que le tuk-tuk de Damazin aidera les femmes et les filles.

« Remettre les clés du véhicule à une femme indépendante membre de cette communauté a été un véritable bonheur », explique-t-elle.

*Pseudonyme

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