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Cambodge : établir des relations saines pour éliminer les violences faites aux femmes

Un programme pilote tente de mettre fin au cycle de violences au Cambodge, où la moitié des femmes et un quart des hommes déclarent que battre sa femme est justifiable. © UNFPA Cambodia/Sophanara Pen
  • 20 Juillet 2017

KAMPONG CHAM, Cambodge – Les femmes de la province cambodgienne de Kampong Cham connaissent bien la violence. Un sondage de 2014 a révélé que 33 pour cent d’entre elles avaient subi des violences depuis l’âge de 15 ans. Un chiffre édifiant, que le reste du pays suit de près : à l’échelle nationale, une femme sur cinq a déjà subi des violences physiques.

Un grand nombre de ces abus sont considérés comme normaux. Au Cambodge, la moitié des femmes et plus d’un quart des hommes pensent que certaines conditions justifient les violences faites aux femmes. Une étude a aussi montré en 2013 que presque 100 pour cent des hommes et des femmes pensaient que pour être un homme, il fallait être « un dur ».

Un programme pilote s’est donné pour mission de mettre fin à ce cycle de violences. Des animateurs font de la sensibilisation communautaire pour aborder le problème épineux des violences et des inégalités basées sur le genre, en commençant par les problèmes domestiques. 

Ouk Kimchheang, 52 ans, parle de son expérience familiale.  © UNFPA Cambodia/Sophanara Pen

« Il rentre souvent ivre et retourne sa colère contre moi quand je lui demande où il était ou que j’essaie de lui parler de ses problèmes d’alcool », a expliqué Ouk Kimchheang, 52 ans, décrivant la situation avec son mari à l’une des séances de groupe dans la commune de Samrong.

Elle a parlé des difficultés à aborder certains problèmes comme le manque de communication, évoqué lors d’une séance précédente : « j’ai expliqué à mon mari ce dont nous discutons ici. Il n’a pas eu l’air intéressé et il est resté silencieux. »

Une nouvelle génération de relations saines

D’après les animateurs, la situation de Mme Kimchheang est courante. Même si la plupart des participants à ces séances sont des femmes cherchant à améliorer leurs relations familiales, les organisateurs sont convaincus que c’est une première étape essentielle dans l’élimination des violences conjugales et la promotion de l’égalité des genres.

De nombreuses études montrent que les enfants exposés à la violence conjugale ont plus de chances que les autres d’en perpétrer ou d’en subir à leur tour à l’âge adulte. Cette initiative pilote vise donc à aider les adolescents à former des relations saines dans leur environnement familial actuel. Cela aide aussi les parents à montrer l’exemple de comportements sains. A mesure que les relations des familles participantes s’améliorent, leurs membres peuvent s’intéresser de plus près à d’autres problèmes, comme les stéréotypes de genre et leurs conséquences néfastes. 

Sor Bunthat, l’un des animateurs de Boeung Nay, explique que le programme aide à réduire la violence conjugale.  © UNFPA Cambodia/Sophanara Pen

Le programme est composé de deux séries de séances de groupe : l’une pour les adolescents, et l’autre pour les parents. Ces séances traitent surtout des relations positives, de la gestion du stress et de la colère, de l’amélioration de la communication et de la résolution de conflits.

Les participants discutent aussi de problématiques liées aux droits de l’Homme et au genre, et apprennent à reconnaître différentes formes de violence, dont la violence psychologique et économique.

Chan Nary, 33 ans, qui participe régulièrement aux sessions pour les parents dans la Commune de Sro Ngè, explique ainsi que ces informations lui ont été utiles. « Je contrôle beaucoup mieux ma colère à présent lorsque je communique avec mes enfants. Je suis plus à l’écoute de leurs problèmes ». 

Un impact visible

Ce programme a été lancé en septembre 2016, en partenariat avec le Ministère des femmes, l’UNFPA et le Programme régional commun des partenaires pour la prévention (Partners for Prevention Regional Joint Programme). Il a été mis en place dans cinq communes de la province de Kampong Cham.

Environ 30 animateurs – des bénévoles choisis au sein de la communauté locale – ont reçu une formation intensive, un prérequis pour pouvoir organiser ces séances. Ils ont à leur tour pu toucher 125 parents et 125 adolescents. 

« Ce que j’ai appris aux séances le week-end m’a aidée à changer ma façon de communiquer avec mon mari et mes enfants », explique Heng Chanthorn, à Samrong. © UNFPA Cambodia/Sophanara Pen

Les animateurs disent constater eux aussi des changements dans leurs relations.

« Avec ce travail, je contribue non seulement à prévenir la violence conjugale dans ma communauté, mais cela m’aide aussi à améliorer mes propres interactions avec mes enfants », explique Sor Bunthat, un animateur de 35 ans, qui est aussi agriculteur et père de deux enfants.

Selon Suong Thach, l’une des animatrices de la commune de Sro Ngè, les effets du programme commencent à devenir visibles. « Je suis tellement contente de voir les attitudes changer » , dit-elle. « Les gens sont plus aimables dans leur communication quotidienne. »

Même Mme Kimchheang explique que sa relation avec son mari s’est améliorée.

« Depuis quelque temps, mon mari ne boit plus, et il participe souvent aux tâches ménagères. Et même s’il ne vient pas aux séances, il m’encourage à y assister tous les week-ends », explique-t-elle. 

– Sophanara Pen (traduit de l'anglais par Marie Marchandeau)

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